Elisabeth Partouche, présidente du groupe électronique de la CDAF : ”Bien acheter suppose de bien s’informer”

Le 27/04/2010 à 16:52 par La Rédaction

Pour bien acheter, il faut être au courant des prix pratiqués partout dans le monde et savoir évaluer la qualité des produits et des services. Ce qui suppose un minimum de connaissances techniques. Elisabeth Partouche fait le point sur ces problèmes. De plus en plus de fabricants de matériels et de sous-ensembles électroniques, parmi lesquels des sous-traitants, font du «sourcing». Comment cette tendance évoluera-t-elle ?

Elisabeth Partouche : Le « sourcing » est effectivement une réalité. Cependant, les schémas de « sourcing » diffèrent suivant les profils des sociétés. Le cas le plus rentable est celui de l’entreprise à fort volume d’achats de composants et de services qui a les moyens d’entretenir une présence dans le pays fournisseur. Ce bureau est le plus souvent constitué d’un encadrement de collaborateurs expatriés et de personnels locaux. C’est au sein d’un sous-groupe de tels profils que le « sourcing » devrait se développer le plus à l’avenir. Ensuite, il y a les entreprises dont le volume d’achats et/ou les moyens financiers ne supporteraient pas le soutien de structures locales à l’étranger. Pour ces dernières, la solution est de faire appel à des intermédiaires disposant d’une présence dans les pays fournisseurs. De tels partenaires ont déjà homologué des fabricants chez lesquels ils achètent en volume pour le compte de plusieurs clients. Dans l’un ou l’autre cas, il demeure toutefois primordial pour le client de pouvoir, à tout moment, visiter et auditer les fournisseurs.

De bonnes prévisions de ventes permettent aussi aux fabricants d’équipements électroniques d’ajuster leurs achats de composants et d’optimiser leurs stocks, donc d’économiser de l’argent. Or, les prévisions deviendraient de plus en plus difficiles à faire…

Elisabeth Partouche : Malheureusement, il semble que ce manque de prévisions soit aujourd’hui structurel. Pour ceux qui fournissent encore des prévisions, l’horizon se rétrécit aussi de plus en plus.

Quelle doit être la qualité majeure de la relation entre le donneur d’ordres et son sous-traitant au plan des achats pour que naisse une relation «gagnant-gagnant»?

Elisabeth Partouche : Entre les deux protagonistes c’est la transparence, mais aussi chez chacun d’eux, en interne. Parce que si la transparence manque, chez le donneur d’ordres par exemple, il se pourrait que des négociations sur les prix, faites par le bureau d’études de ce dernier, ne soient pas transmises au service achats et donc au sous-traitant.

Des fournisseurs se sont plaints du manque de savoir technique de certains acheteurs qui s’arc-bouteraient sur le paramètre prix sans tenir compte des services offerts et de leur qualité. Qu’en pense le groupe électronique de la CDAF ?

Elisabeth Partouche : Au groupe électronique de la CDAF, nous sommes très sensibles à ce problème qui a fait l’objet de tables rondes au cours desquelles les participants ont été unanimes à dénoncer le fait de confier à des débutants la fonction achats de services. Au cours de ces rencontres, les acheteurs novices confrontés à de telles situations peuvent, en revanche, bénéficier des retours d’expériences et des « best practices » de leurs aînés. Parce que l’achat de produits complexes et/ou de services ne se résume pas à un simple achat de produits élémentaires comme des vis ou des boulons. C’est le sous-traitant ou le fournisseur qu’il faut juger à partir de multiples critères, parmi lesquels la tenue des délais de livraison, la qualité des pièces produites, la capacité d’achat, de « sourcing » et de « supply chain ». En fait, l’acheteur audite l’organisation du sous-traitant. Aussi, pour négocier des achats de services et de composants complexes ou de cartes électroniques, l’acheteur doit au minimum avoir un vernis technique qui lui permette de comprendre ce qu’il souhaite acquérir. Pour cela, sans obligatoirement passer par un enseignement technique, il lui faut au moins une formation sur le tas et de l’assiduité… Dans la pratique, cinq ans d’expérience semblent un minimum pour passer aux achats de services. Car, j’insiste, acheter des services suppose de comprendre et pouvoir évaluer l’organisation industrielle d’une entreprise, la qualité de sa chaîne d’approvisionnement en plus de la qualité de ses produits. Enfin, l’acheteur doit être bilingue « français-anglais » de façon à pouvoir opérer dans le cadre mondial qui est aujourd’hui la norme. Et, dans ce domaine, il y a encore des efforts à faire ! Beaucoup trop d’acheteurs industriels français ne maîtrisent pas l’anglais. C’est un problème.

Des éditeurs proposent des outils de gestion de l’obsolescence, des modules d’ERP dédiés aux achats de composants… De quels outils informatiques les achats de composants ont-ils besoin en priorité?

Elisabeth Partouche : Dans la pratique, les demandes les plus courantes semblent concerner des modules d’achats d’ERP. Mais en fait tous ces outils prennent de plus en plus d’importance. D’ailleurs, dans nos industries, ce type d’investissements est aujourd’hui considéré comme stratégique et les budgets pour de tels achats sont relativement bien acceptés par les directions des entreprises.

Propos recueillis par Didier Girault

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