Frédéric Haine (Freescale) : « Personne ne sait trop quand arrivera le LTE »

Le 04/11/2009 à 15:17 par Frédéric Rémond

Frédéric Haine, responsable européen des solutions réseaux chez Freescale, détaille les raisons qui pourraient freiner ou accélérer le déploiement de l’après-3G, des raisons tant techniques qu’économiques. Comment évolue actuellement le rythme de déploiement d’infrastructures télécoms en Occident ?

Frédéric Haine : Clairement, la cadence d’installation d’équipements de téléphonie mobile est loin de son pic de 2008. Les opérateurs occidentaux ralentissent ou arrêtent le déploiement de stations de base GSM et reportent leurs investissements sur la 3G. Quant au LTE, nous n’en sommes encore qu’aux essais techniques… Si l’on en croit les analystes les plus optimistes et certains opérateurs très actifs sur cette technologie, comme Verizon, T-Mobile ou ATT, nous pourrions assister à des essais étendus du LTE l’an prochain et à un début de commercialisation en 2011. Mais d’autres estiment que le LTE ne verra pas le jour avant 2013 ou 2014… De toute façon, le LTE ne devrait pas remplacer le WCDMA, mais coexister avec lui durant de longues années.

Quelle est la situation dans les pays émergents ?

Frédéric Haine : Alors que l’Europe, par exemple, reste très dominée par le standard GSM, la Chine s’avère beaucoup plus hétéroclite, puisque s’y côtoient les standards GSM, CDMA, TDS-CDMA, WCDMA, bientôt LTE… En outre le LTE chinois, dit LTE TDD, attendu pour la foire de Shanghai l’an prochain, diffère de la version occidentale. Cela accentue les opportunités pour les fabricants, mais aussi la complexité du déploiement d’infrastructures. Mais ce marché continue d’être porteur de croissance, de même que le marché indien – même si la pression sur les prix s’avère encore plus féroce sur ce dernier.

Quelles sont les raisons qui freinent le déploiement de l’après-3G et en particulier du LTE ?

Frédéric Haine : Comme toujours, il y a des raisons économiques et techniques qui se télescopent en cercles vicieux ou vertueux : la vigueur ou la mollesse de la demande pousse les fabricants à accélérer ou freiner leurs investissements, ce qui conditionne la date d’arrivée de la technologie. Prenez le cas du WCDMA : les investissements ont été lancés en 2001/2002, mais les réseaux ne sont réellement utilisés que depuis deux ou trois ans. Les fabricants d’équipements et les opérateurs en sont donc encore à les rentabiliser et cela ne les motive pas à investir massivement dans le LTE. Ce dernier pose ensuite de vrais problèmes techniques à résoudre. Un exemple concret : s’il faut un cœur Power pour assurer le traitement bande de base d’une carte GSM, il en faut quatre ou huit pour gérer l’équivalent en WCDMA – et le bond en performances requis pour le traitement DSP est encore plus imposant. Or le LTE est bien plus exigeant que le WCDMA ! Cela implique de maîtriser des architectures multicœurs qui, seules, peuvent répondre à ces besoins et permettre d’installer des équipements évolutifs au niveau logiciel, au moins au niveau du traitement processeurs et DSP. La partie radiofréquences posera un autre challenge, matériel cette fois, si les bandes choisies pour le LTE diffèrent de celles employées pour le WCDMA : il faudra surveiller l’évolution de la norme à ce sujet. Enfin, un autre écueil de taille retarde le déploiement du standard LTE : il n’y a aucun terminal LTE aujourd’hui sur le marché.

Quels sont, a contrario, les motifs qui pourraient accélérer l’arrivée du LTE ?

Frédéric Haine : La principale raison de croire au LTE réside dans les limitations du WCDMA, qui a curieusement été pensé plutôt pour la voix que pour les données. Dès aujourd’hui, dans les pays où la commercialisation de clés de connexion 3G pour PC portables rencontre un vif succès – Italie, Royaume-Uni, Espagne – les utilisateurs se heurtent déjà à des problèmes d’encombrement de réseaux 3G parfois au bord de la saturation. Des opérateurs pourraient donc être tentés de déployer du LTE dans d’autres bandes de fréquences pour répondre à ce besoin et au succès de l’iPhone [qui passe désormais par la 3G] : aujourd’hui, ce sont les principales applications de la radiotéléphonie utilisée comme accès de données à haut débit. 

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