Couverture ElectroniqueS n°127

La production électronique devrait chuter de 6,8 % dans le monde et de 11,7 % en Europe cette année, estime le cabinet Décision. Il prévoit un retour de la croissance en 2010, mais à un faible degré : 1,6 % à l'échelle mondiale et 0,3 % en Europe. La crise économique aura un impact important sur la croissance de la production électronique mondiale, avance le cabinet Décision dans la dernière mise à jour de son étude World Electronic Industries 2008-2013. Avec 1 136 milliards d'euros en 2008, « nous partons d'un bon niveau et la chute n'en sera que plus sévère en 2009. Nous estimons ainsi que la baisse de la production électronique sera cette année de 6,8 % dans le monde et de 11,7 % en Europe. A plus long terme, nous avons été contraints de réviser fortement nos prévisions. Alors que dans notre précédente étude, publiée en 2008, nous envisagions une progression annuelle de 6 % par an, nous tablons désormais sur une croissance moyenne de 2,7 % par an dans le monde », explique Didier Coulon, directeur du cabinet Décision. Dès 2010, la croissance sera de retour, mais elle sera faible : 1,6 % à l'échelle mondiale et seulement 0,3 % en Europe.Au-delà de ces chiffres, l'étude montre que les marchés les plus en pointe sont actuellement la santé, l'environnement et la sécurité. Les télécoms et l'informatique continueront à souffrir en Europe, mais la France ayant déjà restructuré son industrie vers les secteurs professionnel, industriel, aéronautique et militaire, elle devrait subir moins que ses voisins l'impact de la mauvaise santé des marchés de grand volume (voir encadré ci-dessous).Les produits issus de ces marchés (téléphones mobiles, téléviseurs, PC, etc. ), sont fabriqués par millions, voire par milliards d'unités, mais ne représentaient, en 2008, que 53 % de la production électronique mondiale. Le périmètre de l'électronique s'étend en effet également à l'électronique professionnelle, incluant l'électronique embarquée dans les transports, les équipements de Défense, les infrastructures des technologies de l'information, ainsi que l'électronique utilisée pour améliorer les procédés de production et la productivité. Fabriqués en moindre quantité, ce sont ces marchés qui intéressent l'Europe.Le retour au niveau de 2008 n'est prévu qu'en 2011Si l'essentiel de la production électronique en grands volumes est en effet concentré en Asie, l'Europe et l'Amérique du Nord détenaient encore respectivement la deuxième et la troisième place mondiale, tous domaines confondus, et étaient ensemble, à l'origine de 40 % de la production électronique dans le monde. Comparable en taille à l'industrie automobile (1 800 milliards d'euros en 2008) et à l'industrie chimique (2 300 milliards d'euros), l'industrie électronique (avec ses 1 136 milliards d'euros) est aussi bien plus jeune. Elle a enregistré un développement rapide au cours de ses cinquante années d'existence. D'abord portée par les plans gouvernementaux des années soixante et soixante-dix, par la demande des entreprises dans les années quatre-vingt, puis par les besoins individuels dans les années quatre-vingt-dix, l'industrie électronique vit actuellement une nouvelle évolution en s'efforçant de répondre aux besoins sociétaux en matière d'énergie, de sécurité et de santé (voir ci-contre). Des défis auxquels elle devra répondre en fournissant des solutions innovantes qui, pour nombre d'entre elles, sont encore à imaginer. Si elles sont menées à bien, ces solutions devraient permettre d'offrir des perspectives de développement à long terme pour l'ensemble de l'industrie au cours des prochaines décennies, souligne l'étude du cabinet Décision. Grâce à ces nouvelles applications, et après une baisse conséquente en 2009 due à la crise économique, le marché mondial de l'électronique devrait se stabiliser en 2010 avant de retrouver son niveau de 2008 en 2011. Les sous-traitants seront plus sévèrement touchés par la crise que les équipementiers, lesquels réagiront soit en réduisant le périmètre de leurs activités (comme est en train de le faire Nortel), soit en relocalisant une partie de leur production dans leurs propres usines (comme le fait Nokia). Les impacts à court terme de ce type de réorganisation devraient être violents pour les sous-traitants, mais ceux qui trouveront les ressources pour s'en sortir seront cependant les premiers acteurs de la chaîne de valeur de l'électronique à bénéficier de la reprise, avance Décision.Toutes les régions du monde enregistreront un déclin en 2009, estime Décision, l'Europe étant la plus touchée avec une baisse de sa production de 11,7 %, contre une baisse de 7,3 % pour l'Amérique du Nord et de 2,6 % pour la Chine. Sur l'ensemble de la période 2008-2013, l'Europe devrait décliner de 0,4 % par an, mais s'en sortira mieux que l'Amérique du Nord (-2 %), tandis que la Chine devrait progresser de 7 % par an. L'électronique professionnelle et l'électronique automobile représentent dès à présent la majorité de la production électronique dans de nombreux pays développés, cette part atteignant 70 % en Europe. A l'échelle mondiale, ces domaines devraient connaître la plus forte croissance. A l'inverse, celle des marchés de grands volumes devrait être parmi les plus faibles (voir schéma ci-contre).Une industrie stratégique qui reste debout malgré la criseSans maîtrise de l'électronique, l'indépendance de pans entiers de l'économie pourrait être remise en cause, souligne Décision. Le cabinet d'études se prépare d'ailleurs à mettre en valeur l'importance stratégique de cette industrie et à accompagner la Fieec dans la démonstration qu'elle compte mener en direction des pouvoirs publics pour valoriser le secteur.La réponse aux besoins sociétaux (médical, sécurité, énergie…) se trouve en grande partie entre les mains de l'Europe et de la filière électronique en France, grâce à son savoir-faire dans le domaine de l'électronique professionnelle. Pour sa part, l'Asie, et en particulier la Chine, restera l'atelier électronique du monde, où de nombreux équipementiers américains et européens sont implantés. Par contre, les équipementiers qui produisent en France sont essentiellement implantés sur les marchés de l'embarqué et de l'industriel.Afin de répondre aux préoccupations de deux populations différentes, celle qui s'intéresse aux marchés de masse, et celle qui est centrée sur les marchés professionnels, l'étude de Décision propose pour la première fois deux tomes distincts.L'électronique française n'est pas en si mauvaise postureL'électronique professionnelle, l'électronique de Défense et l'aéronautique jouent un rôle dominant en Europe, la France et le Royaume-Uni représentant un pôle mondial qui peut faire jeu égal avec les Etats-Unis.« Ces domaines présentent l'avantage d'être à contre-cycle par rapport aux marchés de grands volumes et de se comporter actuellement bien mieux que ces derniers. Grâce à cette situation particulière en Europe, la France devrait moins souffrir que ses voisins de la crise de la production électronique. Si notre pays est fortement exposé au marasme du secteur automobile, il dispose également de niches technologiques telles que la filière de la carte à puce et celle des équipements industriels de production où nous nous attendons à des perspectives de croissance forte », estime David Enu, consultant chez Décision.« Nous connaissons actuellement une récession en France comme dans la plupart des pays, mais nous nous en tirons plutôt mieux car la croissance mondiale est davantage tirée par le marché professionnel. Si notre prévision de croissance annuelle moyenne est globalement de 2,7 %, elle est plus faible pour les produits de grands volumes, très concurrentiels et confrontés à des marges bien plus faibles », ajoute-t-il. « Nous subissons moins les secousses de la baisse, mais nous reprendrons également plus lentement le chemin de la hausse », tempère-t-il.Les besoins sociétaux nous imposent la mise en &oelig;uvre d'infrastructures intelligentes, par exemple pour assurer la sécurité des personnes, réaliser des économies d'énergie ou encore soigner à distance. Il se trouve que nous sommes en avance sur ces créneaux d'avenir, souligne Décision.

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