Couverture ElectroniqueS n°127

Le problème du très haut débit ? Il est à la fois marketing, économique, politique, technique, et financier. Or on ne peut pas plaire à tout le monde. En l'occurrence, la « régulation », qui croit agir pour le bien de tous, risque, dans ce cas précis, d'injecter dans les engrenages plus de grains de sable que d'huile. Il peut donc être utile d'amoindrir son importance. Vous lisez peut-être là le mille et unième article sur le très haut débit. Mais les enjeux sont tellement considérables (il faudrait, entre autres, investir 30 M d'euros pour câbler l'essentiel des foyers français en fibre optique) que tout doit être fait pour réduire les erreurs de démarrage au minimum. Il est donc préférable d'évaluer les solutions potentielles avant plutôt qu'après l'engagement des opérations.Rappelons quelques données utiles à toute réflexion.Les besoins de débit exprimés actuellement par les utilisateurs sont, sauf exceptions, de l'ordre d'une quinzaine de mégabits par seconde. Apporter un tel débit au plus grand nombre et le plus vite possible est donc le grand enjeu prioritaire.Il n'y a pas de limite de débit pour les besoins du futur. Prenons l'exemple d'une future application du très haut débit quasiment jamais citée, à savoir le téléchargement d'un logiciel sur un PC uniquement en cas de besoin (afin que ce dernier ne réside pas dans le disque dur du PC, technique qui évite les virus, les mises à jour, et les coûts d'achat). Idéalement, un téléchargement de 100 Mo devrait dans ce cas pouvoir ne nécessiter qu'un dixième de seconde. Bien sûr, là, aucune issue n'est possible hors de la fibre optique.Il n'y a aucune raison pour que des besoins un peu fous exprimés par certains soient financés par l'ensemble des usagers. Réciproquement, il serait bon aussi que les “ fous de technologie ” puissent développer leurs talents.Vouloir imposer un “ dégroupage obligatoire ” aux opérateurs historiques a pour effet final de ralentir leurs investissements alors que ce sont eux qui sont les plus à même d'investir massivement. Les opérateurs, comme tous les industriels, doivent prendre des risques ; mais ils doivent aussi, dans ce cadre, pouvoir calculer un retour sur investissement probable. Ce qui est quasi impossible avec des “ dérégulations ” dont les principes peuvent changer dans le temps.Il s'avère que, dans les villes, là où les investissements en très haut débit vont démarrer, l'essentiel des coûts, du moins pour les fibres optiques, se situe au niveau des immeubles du fait de la gestion des autorisations à demander aux syndics et des rendez-vous à prendre. On est là loin du c&oelig;ur du savoir-faire et de la vocation principale des opérateurs…Il s'agit donc de gérer la transition haut débit/très haut débit de la façon la plus pragmatique possible. Pour cela, il serait bon, en premier lieu, que les opérateurs puissent externaliser toutes les opérations à effectuer à partir du pied de l'immeuble : en cas de besoins de très haut débit exprimés par les copropriétaires, des sociétés indépendantes agréées pourraient proposer des devis adaptés à la copropriété pour équiper l'immeuble : les éventuelles fibres ou les fourreaux d'attente pourraient alors être posés par ces sociétés puis gérés par les syndics comme les réseaux d'eau, de gaz ou d'électricité déjà en place dans les immeubles. Les opérateurs verraient leurs coûts d'installation divisés par plus de deux puisque leur rôle s'arrêterait au pied de l'immeuble, ce qui pourrait peut-être leur permettre de ne pas augmenter leurs abonnements mensuels en cas de basculement d'un usager au très haut débit.Mais l'interface opérateur/réseau de l'immeuble deviendrait alors un produit clé. Il serait donc bon que tous les intervenants possibles s'assoient autour d'une table pour définir les caractéristiques d'une gamme d'armoires d'interconnexion universelles d'immeuble, appelées à être produites par centaines de milliers de pièces (donc peu coûteuses). Elles devraient pouvoir accepter à la fois des interfaces de connexion fibre/fibre, des convertisseurs fibre/cuivre ADSL, des convertisseurs fibre/cuivre VDSLx et des connecteurs cuivre/cuivre (aucun nouveau service). Et ce, pour répondre aux besoins de tous les usagers, de tous les budgets, et de tous les opérateurs.Des armoires d'interface universelles au pied de chaque immeubleL'inconvénient de cette solution est qu'un foyer souhaitant le très haut débit aurait alors affaire à deux interlocuteurs au lieu d'un seul, le syndic et son opérateur. Mais cette situation est déjà bien connue des copropriétaires qui veulent bénéficier d'un bouquet de programmes TV satellite à partir d'une parabole située sur le toit. Autre inconvénient : il peut y avoir incompatibilité théorique à faire cohabiter dans une gaine d'immeuble des liaisons traditionnelles cuivre ADSL avec des liaisons cuivre VDSL (qui permettent de monter théoriquement à plus de 100 Mbit/s sur une distance de moins de 300 m). Aujourd'hui, des interférences seraient possibles. Espérons que la future norme VDSL3 (article à paraître dans notre prochain numéro) répondra en ce sens à tous les espoirs qu'elle porte en elle.

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