Couverture ElectroniqueS n°127

Hier très soucieux de maintenir leur contrôle sur toutes les étapes du développement de leurs terminaux, les fabricants de mobiles sont de plus en plus demandeurs, pour concevoir leurs produits, de solutions clés en main associant matériel et logiciel ; et cela avec les mêmes contraintes de coût et d'encombrement que par le passé. L'émergence de nouveaux marchés, demandeurs de terminaux très peu chers, l'entrée en lice d'opérateurs de plus en plus prescripteurs et l'inflation des coûts de développement logiciel changent peu à peu la donne dans le petit monde des fabricants de radiotéléphones. « Depuis deux ans, nous assistons à une évolution significative de la demande, note ainsi Thierry Tingaud, vice-président responsable de l'activité télécoms européenne de STMicroelectronics. A côté des clients traditionnels, qui continuent de garder la maîtrise du c&oelig;ur chez eux, nous voyons apparaître des sous-traitants, concepteurs ou non, très demandeurs de solutions plus ou moins clés en main », ajoute-t-il. « Nous assistons à une déverticalisation du marché », précise, de son côté, Yannick Le Nue, vice-président ingénierie de Cellon, responsable du groupe de R&D du Mans, qui, lui, développe aussi bien des modules GSM tout faits (comme Wavecom) que des plates-formes ou des terminaux clés en main sur lesquels l'équipementier, voire même l'opérateur, n'a plus qu'à imprimer sa marque. Alors que les fabricants de la première heure, Nokia en tête, avaient tendance à vouloir tout faire eux-mêmes, bien souvent d'ailleurs en partenariat avec leurs fournisseurs, les nouveaux venus, surtout ceux qui visent les marchés émergents de gros volumes (tels la Chine ou l'Inde) où les prix doivent être serrés au maximum, sont plutôt à la recherche, sinon de solutions toutes faites, au minimum de designs de référence, combinant matériel et logiciel destinés à leur faciliter le travail et à accélérer la prolifération de produits à partir d'une même base. Des solutions pour tous les types de marché Même les poids lourds devraient y venir à plus ou moins court terme pour pouvoir se consacrer à ce qui les différencie de leurs concurrents, à savoir l'interface homme-machine, l'esthétique et autres petits ou grands “ plus ” qui ne dépendent pas de normes, type GSM, GPRS, UMTS, Edge, Bluetooth ou autres. Ils y viendront aussi, car leurs coûts de R&D explosent. Pour répondre à ces nouveaux besoins, nous avons vu fleurir ces dernières années, et principalement en 2003 (voir notre numéro du 28 février 2003), designs de référence, plates-formes, modules et autres radiotéléphones sur une puce. Cette nouvelle donne impose toutefois une collaboration plus étroite entre les fabricants de semiconducteurs, « elle oblige les fabricants de composants à travailler ensemble », explique Jean-Marc Pesnel, vice-président Europe d'Agilent Semiconductor. D'ailleurs, Agilent vend aujourd'hui en direct à certains fabricants de semiconducteurs. De son côté, STMicroelectronics, qui ne fabrique pas d'amplificateurs de puissance, qualifie certains fournisseurs pour ses propres designs de référence. L'entrée en lice des opérateurs impose également de nouvelles relations entre fournisseurs et clients. Les opérateurs, qui pour certains commencent à travailler directement avec les ODM (sous-traitants concepteurs), deviennent ainsi la cible des fournisseurs de semiconducteurs car ils sont eux aussi des prescripteurs. « Rencontrer les opérateurs nous permet d'anticiper les besoins et donc d'être prêts au moment voulu », explique Patrick Le Bihan, directeur du marketing européen de Spansion Fasl LLC (la filiale flash commune AMD-Fujitsu), pour lequel la France est de ce fait loin d'être un marché marginal. Ce n'est pas non plus parce que les radiotéléphones ne sont plus produits en Europe (notamment en France) qu'il faut négliger cet aspect de la question souligne, Jean-Marc Pesnel : « Un grand nombre de mobiles continuent en effet d'être conçus sur le Vieux Continent, et c'est là que se font les choix des composants », précise-t-il. Même si une certaine standardisation est en marche, notamment dans le secteur du multimédia (voir article ci-dessous), de vraies difficultés techniques existent encore et devraient perdurer. « Le marché du radiotéléphone n'est pas celui du PC et ne le deviendra probablement pas », conclut Thierry Tingaud. Ne pas confondre plates-formes, designs de référence et modules La notion de plate-forme diffère d'un fournisseur à l'autre : chez Motorola, elle recouvre les jeux de circuits, les piles de protocoles bas niveau, les outils de développement pour personnaliser le téléphone, et une aide à la qualification. Pour Cellon, une plate-forme associe une solution système fournie par le fabricant de semi-conducteurs, l'interface homme-machine (avec l'écran et le clavier) et les logiciels applicatifs les plus utilisés (MMS, Wap, Java…). La solution système, plus communément appelée design de référence, regroupe en général les composants de base et les logiciels de bas niveau. Le module est, lui, la forme la plus accomplie des solutions clés en main puisqu'il regroupe dans un petit boîtier l'ensemble des composants de base, les piles de protocoles et certains logiciels applicatifs. La standardisation des mobiles multimédias est en marche Infineon, Intel, Motorola, Philips, Renesas, Toshiba et une trentaine d'autres sociétés viennent de rejoindre l'alliance MIPI (Mobile Industry Processor Interface), créée par STMicroelectronics et Texas Instruments partenaires de longue date sur le marché, avec Nokia et ARM, pour simplifier et standardiser la conception des radiotéléphones multimédias (voir notre numéro du 1er septembre 2003). L'objectif de MIPI est de réunir les acteurs de ce marché pour mettre au point des interfaces ouvertes standards entre composants. Cette alliance s'insère entre l'Open Mobile Alliance, qui planche sur les services et les logiciels, et le 3GPP, concentré sur les interfaces RF et couche physique. Elle regroupe désormais cinq des six principaux fabricants de mobiles et quatre des plus importants fournisseurs mondiaux de circuits pour radiotéléphones (seul manque encore à l'appel Qualcomm). Dix groupes de travail sont chargés au sein de MIPI de développer des spécifications définissant les liaisons entre processeur applicatif et module périphérique (appareil photo, afficheur, clavier, etc.).

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