Couverture ElectroniqueS n°127

Est-on à l'aube d'une crise durable de sous-offre en composants ? Personne ne le sait vraiment. Les difficultés actuelles d'obtention de certains produits, de mémoires notamment, pourraient s'avérer aussi bien saisonnières que durables. Une chose est sûre : des délais ont augmenté et il y a des allocations en mémoires flash et en SDram. Si, au 3e trimestre 2003, les délais étaient tous compris entre 4 et 8 semaines avec des prix stables voire en baisse, depuis octobre dernier, c'est l'envolée liée à l'explosion des marchés du DVD, du portable, et au renouveau de la téléphonie mobile ! », constate Jean-Pierre Velly, responsable des ventes de Future Electronics Europe. « Les délais augmentent pour certains composants. Toute production non planifiée pose problème », nous ont déclaré des acheteurs de composants qui souhaitent garder l'anonymat. « Actuellement, il n'y a plus aucun surstock au sein de la supply chain . On assiste à un retour à la normale avec des délais compris entre 8 et 10 semaines », indique Vincent Cellard, responsable de l'Asset management chez Silica Europe.Si de grands fabricants de matériels électroniques ont négocié en 2003 leurs commandes 2004 dans un contexte toujours baissier, c'est peut-être aussi en partie parce que leurs sociétés planifient à l'avance leurs besoins sur un an et travaillent en direct avec les fabricants de composants ou avec des ténors de la distribution “ dans un contexte de partenariat serré ”. « Globalement, il n'y a pas de tension sur les délais et sur les prix », déclarent-ils… même si un acheteur note « de petites tensions naissantes sur des mémoires E2Prom et sur des circuits de puissance ».«Depuis septembre 2003, des tensions se sont fait jour sur les mémoires Dram, flash et Sram dans les configurations servant le marché du PC, puis dans celles utilisées dans le grand public et, enfin, dans celles destinées à la téléphonie portable», annonce Vincent Cellard (Silica Europe). «Aujourd'hui, les allocations sont systématiques pour les mémoires flash (STMicroelectronics, AMD/Fujitsu), pour lesquelles les clients ne peuvent plus trouver que de grandes capacités», précise Jean-Pierre Velly. Et «les prix des flash ont doublé en deux mois», déclare pour sa part Christian Berquier, président de PN Electronics. Les allocations touchent aussi les mémoires SDram, notamment les versions SDR 64 Mbits utilisées dans les applications industrielles, alors que les modèles DDR (employés dans les PC) ne sont pas concernés. Les mémoires E2Prom, quant à elles, pourraient bien être les prochaines sur la liste des composants en voie de raréfaction.En microcontrôleurs, le délai moyen est compris entre 8 et 10 semaines. Seuls certains modèles destinés aux applications de communication affichent des délais de livraison sur de nouvelles commandes de 16 semaines. Outre des difficultés ponctuelles liées à des incidents, tel l'incendie de l'usine Philips de Caen, qui a ralenti la fourniture de circuits analogiques destinés en particulier aux applications carte à puce, les délais d'obtention des circuits linéaires (10 à 14 semaines aujourd'hui) pourraient croître selon certains experts de la distribution.Les circuits de puissance aussi…Les composants de puissance et les circuits de gestion de la puissance seraient également à surveiller du fait de leur utilisation dans tous les matériels électroniques en forte demande (lecteurs de DVD, etc.). Les délais d'obtention de tels composants en boîtiers DPAK/D2PAK oscillent déjà entre 12 et 20 semaines. L'avenir pourrait aussi s'annoncer difficile pour quelques composants discrets encapsulés en boîtiers SOT23 et SMB. Pour obtenir de tels composants, il faut aujourd'hui compter de 10 à 20 semaines.En passifs, « il existe encore des stocks », annonce Philippe Royon, directeur des achats du distributeur généraliste Sorelec. Toutefois, des difficultés pourraient se faire jour pour les versions CMS des condensateurs tantale (utilisés dans les téléphones portables). Alors que des tensions existent déjà en condensateurs céramiques, car les fabricants japonais livrent en priorité le marché asiatique. Philippe Royon (Sorelec) annonce de plus des tensions sur les condensateurs film plastique. « Les délais augmentent en connectique », déclare, pour sa part, Christian Berquier. Quant aux délais de livraison de relais et de commutateurs, ils sont compris entre 10 et 12 semaines, contre de 6 à 8 semaines l'an passé. Cette situation n'a toutefois rien d'alarmant et peut provenir de problèmes purement logistiques.Pour toutes les familles de circuits intégrés, alors que certains experts s'attendent à des remontées de prix, d'autres parient sur un rééquilibrage progressif de l'offre et de la demande grâce à l'équipement en machines de production d'usines ayant subi un arrêt brutal des investissements en 2001.« Dans les mois à venir, on peut s'attendre à des allocations sur certains composants (mémoires, micros et discrets en boîtiers télécoms) », estime Vincent Cellard (Silica Europe). Aujourd'hui, cependant, « nous n'avons noté ni doubles commandes ni phénomène d'emballement », insiste Jean-Pierre Velly. « Les délais se sont allongés en fin d'année 2003 mais cela retombe un peu, note, pour sa part, Philippe Royon (Sorelec), qui fait remarquer que les négociations sur les prix des composants se sont faites dans un contexte baissier. » Ce que nous ont confirmé des acheteurs pour qui toutefois « des tensions pourraient se faire jour au 2e semestre de cette année, du fait, notamment, de la reprise du marché de la téléphonie mobile ». A la question de savoir si les tensions actuelles seront passagères ou durables, Jean-Pierre Velly estime qu'il ne peut pas y avoir, aujourd'hui, de réponse sûre. Vincent Cellard se veut plus catégorique : «Il est nécessaire que les clients s'engagent sur le long terme . Les prix en dollars ne baisseront plus», prévient-il.L'Asie, premier marché pour les composants devant les Etats-Unis (du moins pour les livraisons), est à surveiller car « l'Europe n'est impactée que par ricochet, du fait de l'explosion de la demande en Asie », précise Vincent Cellard. Les lignes de production de composants tournant aujourd'hui à plein régime, la moindre sursollicitation d'un marché (le marché asiatique en ce moment) fait immédiatement entrer dans un régime d'allongement des délais de livraison. Ce phénomène dépend du comportement du consommateur final, qui, en ce moment, aux Etats-Unis comme en Europe, joue plutôt la prudence. Dans ces régions, le marché est aujourd'hui davantage tiré par les investissements en matériels des entreprises qui renouvellent leurs parcs tant informatiques que télécoms.

Les délais de livraison des composants augmentent

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