Couverture ElectroniqueS n°127

A l'instar de la technologie déclinée par le français Crocus Technology, les microcontrôleurs, les mémoires et les capteurs peuvent tirer avantage de l'ajout de couches magnétiques dans des process Cmos classiques. les circuits Cmos «magnétiquement améliorés» de Crocus ne requièrent que deux masques supplémentaires par rapport à un process Cmos usuel. P our des raisons liées à la miniaturisation extrême des plus récents procédés de fabrication, le besoin de nouvelles architectures de mémoires censées remplacer tout ou partie des modèles existants (DRam, flash, SRam Eeprom) s'est fait sentir ces dernières années, faisant fleurir bon nombre d'acronymes tels que PCM, FRam, MRam, RRam… Plus généralement, les technologies ajoutant un soupçon de magnétisme au cœur des process Cmos usuels sont étudiées de longue date, et pas seulement dans les laboratoires de R&D américains et asiatiques. La technologie MLU du grenoblois Crocus Technology en constitue un bon exemple. Crocus exploite une technologie de type MRam (héritée de brevets de NXP, d'IBM et du CEA) au sein de microcontrôleurs sécurisés pour applications sensibles (paiement, stockage) ou en environnement extrême (aéronautique, industrie),lesMRam supportant bien mieux que les flash les températures allant au-delà des 150°C. S'appuyant sur plus de 150 brevets, l'architecture dite MLU ( Magne-tic Logic Unit ) utilisée par Crocus va même au-delà de la simple cellule mémoire. Elle repose sur une base théorique classique de jonction à effet tunnel magnétique (MJT) entre une couche à magnétisation fixe et une autre dont le sens de magnétisation peut être inversé par un champ externe, modifiant ainsi la valeur binaire de la cellule qui correspond à son état de résistance faible ou élevé. Dans une MLU, les choses se compliquent un peu : la couche à magnétisation fixe est remplacée par une couche à magnétisation variable, dont l'état est modifié en combinant l'application d'un champ magnétique et l'échauffement/refroidissement de la cellule. In fine, en lecture, la résistance faible ou élevée de cette cellule est le fruit de la comparaison entre le sens de magnétisation stocké et celui utilisé au niveau de la couche de mesure, et la cellule peut fonctionner non seulement comme une simple cellule mémoire, mais aussi comme une porte logique XOR, ouvrant la voie, au-delà du stockage de données, à des possibilités de traitement du signal. Utilisées dans des mémoires en 90 nm, les cellules MLU offrent des performances alléchantes : 60 ns de temps d'écriture, 15 ns en lecture, 20 ans de rétention de données, une endurance quasi infinie, une surface occupée plus faible que pour une flash Nor ou une mémoire à changement de phase PCM et seulement deux masques supplémentaires. grande tenue en température La jeune société échantillonne ses premiers éléments sécurisés pour cartes à puce basés sur sa technologie originale de mémoire magnétique. « Par rapport à un circuit ST33 comparable à mémoire flash, nous pensons être beaucoup plus rapides grâce à la possibilité de lecture et d'écriture par octet et non par page, et plus sécurisés grâce à cette rapidité de communication qui limite les possibilités d'interception, tout en occupant une surface de silicium réduite de 30 à 40 % », estime Alain Faburel, vice-président de Crocus chargé des applications sécurisées. Du côté des mémoires, plusieurs applications sont visées par Crocus : le remplacement des SRam à batterie (lesquelles sont chargées d'assurer la sauvegarde de données sensibles en cas de coupure d'alimentation), les compteurs énergétiques ou encore les applications à température élevée comme l'automobile, l'industrie ou le forage. Outre les mémoires et les microcontrôleurs, Crocus utilise également cette technologie magnétique pour lancer des capteurs, concurrents des modèles à effet Hall actuels, sur les marchés automobile et industriel notamment (tenue en température jusqu'à 250 °C !). Les premiers modèles de capteurs magnétiques à technologie MLU, les CTSX, viennent de passer avec succès l'étape de qualification chez TowerJazz en technologie Cmos 130 nm et sont désormais disponibles sous forme d'échantillons. Outre ses accords de fabrication avec les fondeurs TowerJazz et SMIC, le grenoblois se donne les moyens de ses ambitions en misant également sur la production en interne : Crocus Nano Electronics, la société commune qu'il partage avec Rusnano (fonds d'investissement étatique chargé du développement de la microélectronique en Russie), vient de lever 60 millions de dollars auprès de ses investisseurs habituels. Ces fonds serviront à achever l'équipement de l'usine moscovite de la joint-venture. Cette usine devrait être en mesure de traiter 500 tranches de silicium 200 mm et 300 mm par semaine d'ici la fin de l'année 2014, c'est-à-dire d'y déposer des couches de matériaux magnétiques afin de fabriquer des mémoires magnétiques, autonomes ou intégrées dans des microcontrôleurs, ainsi que des capteurs magnétiques. Une seconde phase d'investissement est d'ores et déjà prévue afin de doubler la capacité de production de ce site et d'utiliser des technologies plus fines que les 90 nm et 65 nm actuelles.

les circuits Cmos travaillent leur magnétisme

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