Couverture ElectroniqueS n°127

La société d'études anglo-américaine Beechman Research, spécialisée dans le MtoM et l'Internet des objets, a publié début 2015 un rapport sur le futur de l'agriculture. Une industrie qui pourrait s'orienter vers des solutions électroniques et numériques et adopter la vision de l'Internet des objets pour se moderniser, et surtout pour affronter les grands défis à venir concernant la production de nourriture à l'échelle mondiale. L 'organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture ou FAO ( Food and agriculture organization of the United Nations ) prévoit que la population mondiale atteindra 8 milliards d'êtres humains en 2025 et 9,6 milliards en 2050. Pour nourrir tous ces gens, cela implique une augmentation de 70% de la production mondiale de nourriture à cette échéance. Mais plusieurs obstacles de taille se dressent devant cet impératif : le ralentissement de l'accroissement de la productivité, la disponibilité limitée de terres cultivables, les changements climatiques, les besoins croissants en eau, la disponibilité et les prix de l'énergie (en particulier les énergies fossiles) et le manque de renouvellement de la population agricole du fait d'une urbanisation croissante. Selon un récent rapport de l' Intergovernmental Panel on Climate Change (IPCC), une organisation des Nations Unies, les effets du changement du climat sur l'agriculture vont s'amplifier dans les années et les décennies à venir, en particulier à cause d'une fréquence accrue de phénomènes parfois violents comme de très fortes précipitations, des tempêtes, de fortes vagues de chaleur, etc. qui vont contribuer à décroître les rendements agricoles dans le monde. Qui plus est, le changement climatique donnera lieu à des conséquences environnementales en influant sur la saisonnalité des cycles de vie des plantes et des animaux. Par ailleurs, l'agriculture consommant à elle seule 70% de la consommation d'eau dans le monde, la gestion des ressources en eau ira de pair avec la fourniture en nourriture des populations. Bref, les défis sont nombreux et particulièrement difficiles à relever. Pour la FAO, la réponse – ou tout du moins une partie de la réponse – se trouve dans un mouvement collectif que toute la filière agricole (agriculteurs mais aussi coopératives, fournisseurs de matériels agricoles, vétérinaires, etc.) doit engager pour s'équiper en outils et technologies innovantes, en particulier dans le domaine de l'électronique et du numérique. Cette transformation de l'agriculture que prône la FAO porte un nom : agriculture de précision. Le rôle de l'agriculture de précision L'agriculture de précision a pour objectif d'optimiser le rendement de chaque parcelle de terre agricole ou de chaque exploitation en utilisant les outils et les technologies les plus modernes d'une manière soutenue et continue, afin d'améliorer les rendements agricoles sans transiger sur la qualité de la production. Il peut s'agir de technologies telles que des services de géolocalisation, des capteurs, du big data, etc. Entendons-nous bien. Il n'est pas question ici de remplacer l'expertise et l'intuition des agriculteurs, mais plutôt de leur fournir des outils numériques d'aide à la décision qui leur permettront de récolter des données précieuses sur de nombreux aspects de leur exploitation, données acquises en temps réel avec un degré de précision élevé, et auxquelles ils n'avaient pas accès auparavant. De quoi optimiser au mieux les opérations effectuées par les agriculteurs tout en réduisant les gaspillages. < Pour la FAO (Food and agriculture organization of the United Nations), la filière agricole (agriculteurs mais aussi coopératives, fournisseurs de matériels agricoles, vétérinaires, etc.) doit engager un mouvement collectif pour équiper cette industrie en outils et technologies innovantes, en particulier dans le domaine de l'électronique et du numérique. Catalyseurs et obstacles Mais tout ceci requiert un certain nombre de compétences telles que la robotique, l'imagerie, les technologies GPS, les prévisions météorologiques ainsi que diverses autres connaissances techniques et scientifiques. Il est par conséquent primordial de former le monde agricole à ces technologies. Par analogie à des concepts machine-to-machine (MtoM) déjà connus tels que le smart metering ( smart grids ), la smart industry ou les smart cities , l'agriculture de précision est souvent appelée smart agriculture (agriculture intelligente). Il s'agit d'un domaine spécifique mais qui est basé sur des technologies de capteurs par ailleurs très bien établies dans d'autres industries telles que la télématique qui peut être appliquée ici à la gestion de la flotte d'engins et de matériels agricoles, l'e-santé qui peut se transposer à la surveillance de la santé et du comportement du bétail, la gestion du bâtiment qui peut trouver sa place dans la surveillance des silos de céréales… Ces technologies peuvent également être utiles pour récolter des informations sur l'état des sols et des cultures, pour gérer des stocks divers et variés (carburants pour véhicules agricoles, nourriture pour les animaux, engrais, produit des récoltes…). Et comme pour toute installation MtoM ou pour l'Internet des objets, les technologies de l'information sont utilisées ici pour rassembler, collecter, analyser les données et les présenter de telle sorte qu'elles apportent un début de solution appropriée aux utilisateurs, en l'occurrence ici aux fermiers. Le schéma ci-contre synthétise les différents types de technologies autour desquelles s'articule la smart agriculture . UN PROGRAMME EUROPÉEN DÉDIÉ À L'ÉLEVAGE DE PRÉCISION > Un programme européen baptisé EU-PLF (Precision Livestock Farming ou élevage de précision) a été mis en place par l'Union européenne en novembre 2012. > D'une durée de 4 ans et impliquant 21 partenaires académiques, industriels et financiers dont l'Inra (Institut national de recherche agronomique), ce programme a pour objectif le développement d'outils technologiques permettant de surveiller le cheptel d'une exploitation de manière automatique et continue. Ces outils pourront récolter en temps réel des données liées à l'état de santé des animaux, à la productivité de l'exploitation, son impact sur l'environnement, etc. > L'objectif est de faire face à la difficulté pour les exploitants à gérer de manière satisfaisante des fermes d'élevage toujours plus vastes. Mais force est de constater que l'agriculture de précision n'en est encore qu'à ses balbutiements et que l'adoption des technologies évoquées plus haut est lente. Il y a plu-sieurs raisons à cela, à commencer par le coût des solutions que seules de grosses exploitations peuvent s'offrir. Le tableau ci-contre résume les catalyseurs et les obstacles, tant économiques que techniques, au développement de l'agriculture de précision. Les états peuvent contribuer à en stimuler l'adoption, à l'image de plusieurs programmes nationaux déjà mis en œuvre, en particulier en Europe avec le programme Farming 4.0 en Allemagne, mais aussi d'autres initiatives au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, en Espagne, etc. C'est également le cas de l'Union européenne ( voir encadré ci-dessous ) avec son programme sur l'élevage de précision. Texte traduit et adapté à partir d'une étude de Beecham Research intitulée «Towards smart farming: agriculture embracing the IoT vision»

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