Couverture ElectroniqueS n°127

Après avoir convaincu des investisseurs et levé des fonds, le chemin de la réussite est encore long pour les start-up. Pour se développer sereinement, elles doivent mettre des produits innovants sur le marché qui répondent à de nouveaux besoins, accéder aux marchés internationaux, et renforcer leur effectif, pour finalement acquérir le statut de PME qui leur permettra de s'autofinancer. M ême si cela est déjà de l'histoire ancienne, le monde de l'électronique a gardé en mémoire des échecs de start-up prometteuses qui n'ont pu concrétiser leurs ambitions, car leurs innovations étaient arrivées trop tôt et n'étaient donc pas en adéquation avec la demande du marché. Elles ont été lâchées par leurs investisseurs, lassés de ne pas voir venir le retour sur investissement attendu. Ce fût par exemple le cas de Nemoptic, précurseur d'une technologie de papier électronique pour écran LCD baptisée BiNem, lancée trop tôt sur le marché, bien avant l'avènement des liseuses, et donc trop en avance sur les besoins des consommateurs. Les investisseurs n'ont pas voulu continuer à porter à bout de bras cette entreprise, et celle-ci a donc disparu malgré son très haut niveau technologique. Autre exemple d'échec, celui de Highwave Optical Technologies, basée à Lannion et spécialisée dans la conception et la fabrication de composants optiques pour les réseaux de télécommunication à très haut débit. Elle a déposé le bilan en 2005… après avoir employé quelque 1 000 salariés au plus fort de la bulle Internet, en 2001. Ces deux exemples, et bien d'autres, ont refroidi les ardeurs des investisseurs devenus plus prudents pendant quelque temps, mais n'ont pas découragé les innovateurs dans leurs ambitions de répondre à de nouveaux marchés et à de nouveaux besoins, de créer des start-up, de devenir des PME, et pourquoi pas, des ETI. « Aujourd'hui encore, un certain nombre de start-up brûlent beaucoup d'argent et réalisent peu de chiffre d'affaires pendant les premières années de leur existence. Les meilleures, ce ne sont pas celles qui lèvent beaucoup de fonds, mais celles qui génèrent des bénéfices à relativement brève échéance. Au bout de dix ans d'activité, réaliser un chiffre d'affaires de 20 millions d'euros et disposer d'un effectif de 30 à 40 personnes est un bon objectif » , estime Philippe Méré, associé de la société de capital-risque Banexi Ventures. À l'aune des échecs retentissants rencontrés par certaines start-up pourtant prometteuses à l'aube des années 2000, les entrepreneurs d'aujourd'hui savent que rien n'est gagné avant d'enregistrer ses premiers bénéfices. Réussir une levée de fonds n'est que le début de l'aventure Avec l'avènement des objets connectés, des drones civils, des solutions innovantes pour la santé, des outils permettant une meilleure efficacité énergétique, pour ne citer que quelques exemples, l'année 2015, à la faveur de taux d'intérêts bas, a été prolifique en termes de levées de fonds. Loin d'être aisées, ces levées de fonds ne sont pourtant pas suffisantes pour permettre à des start-up de devenir des champions technologiques. Ce n'est que le début de l'aventure, car pour réussir réellement, il faudra développer des produits et surtout les vendre, en France, mais aussi à l'international, et finalement dégager des bénéfices pour s'autofinancer sans nécessiter l'apport de nouvel argent frais. Certaines start-up y parviennent ou sont en voie d'y parvenir. Elles deviendront ainsi des PME ou des ETI, fleurons de la technologie française ou européenne. D'importantes levées de fonds ont eu lieu en 2015, principalement dans le domaine de l'Internet des objets, des Led et des produits connectés pour le bâtiment ( voir Electroniques de décembre 2015 ). Et des grands groupes tels que Cisco, Microsoft, Legrand ou Valeo ne cachent pas leur intérêt pour les start-up. L'un des exemples les plus emblématiques en matière de levées de fonds est sans aucun doute à mettre au crédit de Sigfox, opérateur de réseau cellulaire basse consommation entièrement dédié à l'Internet des objets et aux communications M2M. 2015 est d'ores et déjà une année à marquer d'une pierre blanche pour le toulousain avec la levée de fonds record de 100 Me opérée en février de l'an passé, non seulement auprès de ses investisseurs historiques (Elaia, IXO PE, Partech Ventures, Idinvest et Bpifrance) qui ont renouvelé leur confiance à la société, mais aussi auprès d'un nouveau partenaire financier (Elliott Management Corporation), d'opérateurs télécoms internationaux (Telefónica, SK Telecom et NTT DocomoVentures) et de partenaires industriels (Engie, Air Liquide et Eutelsat). Après avoir déployé son réseau en France, en Espagne, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni, cette levée de fonds va permettre à Sigfox d'accélérer son déploiement en Europe, en Asie ainsi qu'en Amérique du Nord et du Sud. En tant qu'opérateur, seul un déploiement mondial de son réseau peut en effet assurer son succès. Pour ce faire, la société a encore besoin de liquidités, puisque certaines sources lui prêtent l'intention de lever cette année pas moins de 500Me (montant non confirmé officiellement). Sigfox, une ascension irrésistible? Sigfox facture actuellement 1e par objet connecté et vise au moins les 100 millions d'objets connectés d'ici 2020, ce qui propulserait son chiffre d'affaires à 100Me, contre 3Me en 2014, selon des sources industrielles. De plus, la plupart des investisseurs qui soutiennent Sigfox espèrent rentabiliser leur investissement par le biais d'une éventuelle introduction en Bourse. Pour les start-up, il est important de rechercher le plus tôt possible l'efficacité en matière de production. Ainsi, dans le domaine des solutions d'éclairage à Led, Lucibel (28,1 Me de chiffre d'affaires 2015, en progression de 14,4 % par rapport à 2014) a engagé une relocalisation progressive de la conception et de l'assemblage de sa nouvelle gamme de luminaires étanches «Tubular». Celle-ci est effective depuis décembre 2015 et a pris place sur un ancien site de Schneider qui fabriquait de l'appareillage électrique, à Barentin (Seine-Maritime). Ainsi, le temps moyen d'assemblage d'un luminaire «Tubular » Lucibel est passé de 30 minutes lorsqu'il était fabriqué en Chine à 10 minutes pour une fabrication à Barentin. Combinée à une sélection rigoureuse et optimisée de sous-traitants européens pour la fourniture des composants, cette division par trois du temps d'assemblage couplée à une réduction des coûts de transport permet à Lucibel d'avoir un coût de revient de ses «Tubular » fabriqués à Barentin identique à leur coût de revient «made in China rendu France». Créé en 2008, Lucibel est aussi l'un des acteurs majeurs de la technologie Li-Fi. Après une phase pilote conclue avec succès en septembre 2015 avec Sogeprom, filiale immobilière du groupe Société Générale, la technologie Li-Fi haut débit de Lucibel sera déployée plus largement au cours de l'année 2016 au sein du nouveau siège social de ce promoteur, en apportant ainsi une connexion Internet haut débit par la lumière à l'ensemble des salariés couverts par le dispositif. Outre sa facilité de mise en œuvre et d'utilisation, l'atout majeur de la solution proposée par Lucibel, qui a séduit le groupe Sogeprom, concerne la sécurisation de l'échange de données. Au-delà de ce pilote prometteur, Lucibel a annoncé l'industrialisation de sa solution Li-Fi haut débit dans son usine de Barentin et sa mise sur le marché dès septembre 2016.

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