Couverture ElectroniqueS n°127

Cette fois, ça y est : les premiers processeurs pour smartphones haut de gamme compatibles avec les normes de transmission 5G sont ou seront disponibles d'ici la fin de l'année chez Qualcomm, Samsung, Huawei ou encore MediaTek, avec un décollage des services 5G attendu pour l'an prochain. C omme pour les précédentes normes de téléphonie cellulaire, l'arrivée de la 5G requiert la mise en place d'un cercle vertueux entre les opérateurs, qui doivent installer les stations de base et infrastructures 5G sans, pour l'instant, en percevoir de revenus, et les fabricants de smartphones qui doivent équiper leurs terminaux des premiers récepteurs 5G disponibles sans pouvoir en faire un argument marketing immédiat. C'est en 2020 que la conjonction de ces deux efforts commencera à porter ses fruits, avec le lancement par les opérateurs d'offres 5G, à commencer dans les métropoles. Du côté des semi-conducteurs, les ténors du secteur sont dans les starting-blocks. Des modems 5G discrets sont d'ores et déjà disponibles chez certains, mais les choses sérieuses commencent en cette fin d'année 2019 avec les premiers processeurs pour smartphones intégrant en leur sein cette partie modem 5G, émanant de Qualcomm, Samsung ou encore Huawei. Cette intégration est décisive car elle permet de diminuer de manière significative le coût en composants des smartphones 5G qui, pour ce qui est des premiers modèles déjà commercialisés, s'avèrent sans cela particulièrement onéreux. Surtout du sub-6GHz On le sait, la principale difficulté rencontrée par les concepteurs de jeux de circuits 5G réside dans la couverture des deux bandes de fréquences prévues, à savoir celle située en deçà des 6GHz (5G NR sub-6GHz) et celle située entre 24 GHz et 100 GHz (5G NR mmWave) et qui exploite notamment les bandes 24,2527,5 GHz et 27,5-29,5 GHz. Transmettre à 28GHz oblige à s'exposer à de nombreux challenges, en particulier les pertes entre station de base et combiné (jusqu'à 90 dB sur 30 mètres), le blocage des ondes (main, corps, murs…) et la complexité (dont l'encombrement, le coût et la consomma-tion d'énergie) de l'étage d'émission-réception RF. Par exemple, une architecture à réseau d'antennes doit être déployée non seulement au niveau de la station de base (128 éléments minimum), mais aussi dans le smartphone, qui embarquera typiquement 4 à 32 antennes. Et, pour des raisons physiques évidentes, les ondes à 28GHz ont tendance à être bloquées, mais aussi à rebondir sur des objets plus petits que celles de moindre fréquence, d'où l'importance des antennes multidirectionnelles pour capter toutes les réflexions possibles des signaux utiles. Fabriqué avec le process FinFET 7nm aux ultraviolets extrêmes de TSMC, le Kirin 990 5G de Huawei gère les réseaux 2G, 3G, LTE et 5G en bande sub-6GHz. Le traitement numérique en bande 5 GHz est, lui, relativement plus simple à appréhender. Relativement, car il met tout de même en œuvre des techniques complexes: bandes passantes OFDM avec des largeurs allant jusqu'à 400MHz et des intervalles aussi réduits que 0,125 ms, codage LDPC plus efficace que les actuels codes Turbo LTE pour les débits de données élevés, algorithmes de formation, de suivi et de commutation de faisceaux… Leader incontesté du secteur, Qualcomm, avait lancé les hostilités avec un modem 5G discret estampillé X50 et utilisé dans les premiers combinés du marché compatibles 5G. Assurant la fonction modem à la fois pour les bandes sub-6GHz et mmWave, il permet théoriquement des débits descendants pouvant atteindre 5Gbit/s (cinq fois plus que le modem LTE du Snapdragon X16), grâce notamment à l'agrégation de huit porteuses de 100 MHz de large chacune en mode mmWave, soit une largeur totale de 800 MHz contre seulement 80 MHz (4 x 20 MHz) pour le X16. Pour l'heure, les plateformes 5G de l'américain reposent toujours sur ce modem externe, tant pour le Snapdragon 855 que pour le tout récent 855+. Fort de plus de 150 conceptions déjà basées sur cette plateforme, Qualcomm s'apprête à intégrer la partie modem 5G dans ses pro-cesseurs. Ce sera le cas des prochains Snapdragon 8 dont les détails seront dévoilés avant la fin de l'année, mais aussi des Snapdragon 7 fabriqués en 7nm et en cours d'échantillonnage, et même des plus économiques Snapdragon 6 chargés de démocratiser la 5G à partir de la fin de l'année 2020. En attendant, Qualcomm a mis à jour son modem 5G discret avec le X55, qui reprend (et améliore) les fonctionnalités 5G du X50, mais prend également en charge les réseaux 2G, 3G et 4G pour former une solution complète. Le débit descendant théorique culmine ici à 7Gbit/s (3 Gbit/s dans le sens ascendant), avec possibilité de partager les bandes de fréquences en fonctionnement multimode. La bande passante est toujours de 800 MHz en 5G mmWave, mais double en 5G sub-6GHz pour atteindre 200 MHz, toujours en MIMO 4x4. Pour compléter sa plateforme 5G, Qualcomm vient par ailleurs de présenter, au salon IFA de Berlin, un module antenne 5G mmWave baptisé QTM527. Ce module offre une bande passante maximale de 800MHz (dans les bandes 24,2527,5 GHz, 26,5-29,5 GHz, 27,528,35 GHz et/ou 37-40 GHz) et convient notamment aux systèmes d'accès haut débit via la 5G, dans les zones mal couvertes par des réseaux filaires. Ses 64 éléments d'antenne à double polarisation sont capables de transmettre plus de 40 dBm de puissance (classe 1). En cours d'échantillonnage, ce module sera utilisé en volume au premier semestre 2020. Samsung met de la 5G dans ses Exynos De son côté, Samsung lancera d'ici à la fin de l'année la production en volume de l'Exynos 980, son premier processeur pour smartphones intégrant un modem 5G. Fabriqué en technologie FinFET 8nm, ce circuit peut recevoir jusqu'à 2,55 Gbit/s en 5G (bande sub-6GHz), et même 3,55Gbit/s dans le mode EN-DC qui com-bine 5G et LTE. Il supporte en outre les standards Wi-Fi 6 (IEEE802.11ax) et Bluetooth 5. Les bandes 5G mmWave devront, elles, attendre de futures versions pour être supportées… Pour accéder à ces bandes de fréquence avec des composants Samsung, il faudra donc pour l'instant s'en tenir au modem discret Exynos 5100 qui, lui, gère à la fois les spectres sub-6GHz et mmWave (en plus des réseaux 2G, 3G et 4G), avec un débit maximal annoncé à 6 Gbit/s. Ce circuit produit en FinFET 10 nm module les signaux jusqu'en 256-QAM en sub-6 GHz et 64-QAM en mmWave. L'Exynos 980 de Samsung permet de recevoir théoriquement jusqu'à 3,55 Gbit/s en cumulant les flux LTE et 5G. Pour sa part, l'Exynos 980 s'appuie sur deux cœurs CortexA77 tournant jusqu'à 2,2 GHz et six cœurs Cortex-A55 à 1,8 GHz, ainsi qu'un moteur graphique Mali-G76 MP5, un accélérateur de réseaux neuronaux 2,7 fois plus rapide que son prédécesseur et un processeur de traitement d'images supportant le capteur à 108 millions de pixels récemment dévoilé par le sud-coréen, ou jusqu'à cinq imageurs distincts. Le codec vidéo interne gère des contenus 4K à 120 images par seconde, y compris au format HDR10+. Par l'intermédiaire de sa filiale semi-conducteurs HiSilicon, le chinois Huawei a lui aussi procédé à l'intégration d'un modem 5G au sein de son dernier processeur pour smart-phones, le Kirin 990 5G. Fabriqué en FinFET 7nm (avec, précise Huawei, le process TSMC 7FF+ aux ultraviolets extrêmes) et comptant plus de dix milliards de transistors, il couvre, dans sa partie modem, les réseaux 2G, 3G, 4G et 5G en bande sub-6GHz, avec un débit descendant culminant à 2,3 Gbit/s et un débit ascendant maximal de 1,25Gbit/s. Le Kirin 990 5G est alimenté par deux cœurs Cortex-A76 à 2,86GHz, deux autres limités à 2,36GHz et quatre Cortex-A55 à 1,96GHz. La partie graphique est confiée à un moteur MaliG76 MC16 (16 cœurs, donc) à 700 MHz, tandis que le traitement des réseaux neuronaux échoit à trois cœurs asymétriques dédiés répondant à l'architecture Da Vinci que le chinois a conçue et entend décliner dans toutes ses applications nécessitant de l'intelligence artificielle. À noter qu'une version 4G, simplement appelée Kirin 990, est également disponible, avec un modem 2G/3G/LTE, des cœurs Cortex limités à des fréquences légèrement inférieures et deux cœurs neuronaux seulement. MediaTek en embuscade Enfin, on citera le taïwanais MediaTek qui, génération après génération, se rapproche du très haut de gamme, comme en témoigne son dernier Helio M70 5G. Attendu dans des smartphones en début d'année prochaine, il combine des cœurs Coretx-A77, un moteur graphique Mali-G77, un nouveau processeur de réseaux neuronaux et un modem 5G en bande sub-6GHz sur une puce gravée en FinFET 7nm. Àl'ins-tar de ses concurrents, Media-Tek planche également sur la réception 5G en bandes mmWave, et compte proposer des solutions ad hoc l'an prochain à mesure que les infrastructures correspondantes seront déployées. Pour l'heure, les vitesses théoriques (donc à prendre avec les pincettes d'usage) pour l'Helio M70 5G atteignent 4,7Gbit/s en download et 2,5Gbit/s en upload. La partie imagerie supporte, elle, l'encodage-décodage en 4K à 60 images/seconde et les capteurs d'images comptant jusqu'à 80 millions de pixels. Reste le cas Apple. L'américain est connu pour attendre que les réseaux de nouvelle génération soient matures avant de lancer des smartphones compatibles: cela a été le cas avec la 3G et la 4G, nul doute qu'il en sera de même pour la 5G. Et, alors qu'Apple a fini par racheter l'activité modems 5G d'Intel, il est aujourd'hui difficile de savoir s'il optera pour ces puces, dont on ne sait si elles sont réellement disponibles et compétitives, ou pour les cir-cuits d'un autre fournisseur (Qualcomm ou autre). Réponse en 2020…

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