Couverture ElectroniqueS n°127

Les grands noms du transport tels qu'Airbus, la RATP, la SNCF ou Alstom, des constructeurs automobiles tels que le groupe Volkswagen, mais aussi de nombreuses start-up s'intéressent aux transports du futur. Ils sont impliqués dans des projets qui verront le jour dans le courant de la décennie ou à plus long terme, en raison des difficultés à surmonter pour intégrer ces nouveaux moyens de déplacement dans notre environnement. V éhicules volants, taxis-bulle se déplaçant sur l'eau, trains autonomes, Hyper-loop se déplaçant à plus de 1 000 km/h, les projets futuristes devant voir le jour à moyen ou long terme sont nombreux et émanent aussi bien de start-up que de grands groupes tels que la SNCF ou Airbus. Aussi, nous pouvons raisonnablement leur accorder du crédit, même si leur réalisation, tant sur le plan technologique et sécuritaire que réglementaire, semble complexe. Projet futuriste s'il en est, couramment imaginé par les cinéastes depuis des décennies, le véhicule volant pourrait devenir un moyen de transport public dans un horizon de dix à vingt ans. Techniquement opérationnels, il reste à définir les conditions d'intégration de ces véhicules dans les transports urbains existants, sans menacer la sécurité des passagers et des habitants des zones survolées. Le démonstrateur en grandeur nature du CityAirbus, développé par Airbus Helicopters et Siemens, dispose de 4 places et a effectué son premier décollage en mai 2019. Mettre en service des véhicules volants autonomes et électriques, et donc peu bruyants, dont la taille pourrait être plus petite que celle d'un avion de tourisme, pour des trajets urbains ou périurbains, telle est l'ambition d'Airbus. Il y travaille depuis de nombreuses années et en a dévoilé les contours, en première mondiale, au salon de l'automobile de Genève en mars 2017. Il ne s'agissait alors que d'un concept imaginé en collaboration avec Italdesign (filiale du groupe Volkswagen), rejoint par Audi lors de l'Amsterdam Drone Week, en novembre 2018. À cette occasion, les trois partenaires ont présenté des vols de démonstration de leurs véhicules volants et électriques baptisés Pop.Up Next, Vahana ou encore CityAirbus. Il s'agit de véhicules dont certains sont hybrides, c'est-à-dire pensés tout à la fois pour des déplacements routiers et aériens, pouvant se transformer au gré des désirs de l'utilisateur. D'ici à 5 ans, les fondateurs de Sea Bubbles prévoient de mettre en service leurs véhicules flottants dans 50 villes disposant de cours d'eau. Des véhicules volants pour les Jeux Olympiques de 2024 Airbus est désormais convaincu que ce n'est plus de la science-fiction. « Aujourd'hui, nous disposons de toutes les briques techniques. Il faut les harmoniser afin de les intégrer dans la vie quotidienne sans remettre en cause note priorité qu'est la sécurité », affirme Guillaume Faury, le président exécutif d'Airbus. Convaincu que ce projet ne pourra voir le jour qu'avec l'aide de partenaires experts dans leurs domaines respectifs, le groupe aéronautique a conclu des accords avec différents acteurs de la mobilité terrestre et aérienne : les groupes RATP et ADP (anciennement Aéroports de Paris), la région Île de France et la DGAC (Direction générale de l'aviation civile), incontournable, qui établit les règlements pour un survol des grandes villes. Le déploiement de trains autonomes concernera dans un premier temps le fret et le Transilien, puis les TGV et les TER à partir de 2025. Une étude de faisabilité sera menée pour la démonstration d'un système d'aéronef à décollage et atterrissage vertical (VTOL) en zone urbaine pour les Jeux Olympiques 2024 à Paris. À plus long terme, ce mode de mobilité et ses services associés, de technologie française, auront également un potentiel à l'exportation. L'objectif est d'intégrer toutes les opérations : conception, production, maintenance, opérations de vol, gestion du trafic aérien en basse altitude, intégration urbaine et planification, infrastructures physiques (« vertiports », sortes de petits aéroports permettant un décollage vertical) et numériques, et interfaces passagers. Pas besoin de passer son brevet de pilote pour emmener ce type de véhicule dans les airs car il sera autopiloté. Pour circuler, le pas-sager entrera sa destination dans un système de plateforme intelligente qui lui proposera différents trajets possibles, afin de se déplacer au plus vite d'un point A à un point B. Les liaisons ville-aéroport constitueront les premiers cas d'usages. Aussi, le groupe ADP a pour mission de jouer le rôle de catalyseur dans le développement de ce service, d'abord en Île-de-France, puis partout dans le monde, grâce à son expertise d'ingénierie d'infrastructures, parmi lesquelles figurent les plateformes d'accueil appelées « vertiports » qui constitueront de véritables laboratoires d'expérimentation : opérations au sol et en vol, parcours passager, fourniture d'énergie, maintenance, etc. Les partenaires devront également réfléchir à un modèle économique acceptable pour les futurs usagers des véhicules volants. Première cible : les hommes d'affaires recherchant des trajets rapides, par exemple entre l'aéroport de Roissy et le quartier de La Défense à Paris. À plus long terme, ce service devrait intéresser un public plus large. Des trajets à partir de 2 euros le kilomètre L'étude de faisabilité donnera ses premiers résultats d'ici à la fin de l'année. Les premières estimations chiffrent le prix d'un trajet entre 2 et 3 euros le kilomètre, ce qui se rapproche des coûts des taxis. Outre les aéroports et La Défense, les « vertiports » pourraient être situés aux abords des lieux touristiques comme le château de Versailles ou Disneyland Paris. Airbus est très avancé, mais il est loin d'être seul à s'intéresser à ce nouveau marché : de grands groupes tels que Uber et Boeing et des start-up comme Volocopter, Hovertaxi et Electric Visionary Aircraft (EVA) se sont également positionnés avec de nombreux prototypes. Quelques-uns devraient voler dès le début de cette décennie. Le Gouvernement japonais envisage qu'un tel véhicule futuriste allume la flamme olympique lors des Jeux de 2020 à Tokyo, et il annonce une commercialisation de véhicules volants pour transporter le public à partir de 2023 grâce à un soutien de 40 millions de dollars. En France, pour que ce mode de transport s'adresse couramment au grand public et survole des zones urbaines, vraisemblablement le long d'axes routiers tels que les autoroutes urbaines ou les périphériques, il faudra que la DGAC délivre une autorisation, et cela devrait prendre plusieurs années supplémentaires. « Voler » au-dessus de l'eau Voler, mais cette fois au-dessus l'eau, c'était l'ambition d'Alain Thébault et Anders Bringdal, deux ingénieurs aéronautiques et navigateurs à l'origine de la technologie de l'Hydroptère, voilier « volant » sur l'eau grâce à un système de foils, des ailes profilées qui se déplacent dans l'eau. Ils ont décidé de mettre cette technologie au service du grand public. Ils estiment que le futur de la mobilité vient de l'eau, une voie naturelle et historique au cœur des villes, trop longtemps sous-estimée. Aussi, ils proposent de mettre en service un nouveau mode de transport, les « Sea-Bubbles », nom également donné à leur société. Ces « taxis-bulle » peuvent se déplacer sur l'eau à la vitesse d'une voiture en zone urbaine (soit 50 km/h) pour le prix d'une course en taxi, avec un faible impact sur l'environnement, car le système de foils permet de réduire les frottements avec la surface de l'eau, et donc d'aller plus vite en consommant moins d'énergie électrique. Selon certaines estimations, ce système permettrait de réduire la pollution d'au moins 30 % par rapport à la plaisance traditionnelle. Lorsque la capsule « volante » prend de la vitesse, elle se soulève de 40 cm et navigue sans produire de vagues. D'ici à cinq ans, les fondateurs prévoient de mettre en service ces véhicules flottants dans 50 villes disposant de cours d'eau. Leur société, initialement française, vient de passer en majorité à une holding suisse (avec des investisseurs suisses, suédois, chinois et américains). Ce mode de transport innovant a reçu un très bon accueil dans de très nombreuses villes à travers le monde, y compris à la mairie de Paris. Mais en France, il y a un obstacle de taille : la vitesse de navigation sur les fleuves est limitée dans leur parcours urbain, ce qui a empêché jusqu'à récemment des tests complets sur la Seine. Si l'État a donné un accord de principe pour une dérogation, il faudra encore attendre pour savoir si cette autorisation est définitive. Outre les taxis vendus au prix onéreux de 200 000 euros l'unité – ce qui n'empêche pas certaines villes d'être séduites par le concept SeaBubbles – les deux entrepreneurs ont également l'intention de développer le Flybus, une bulle flottante visant à transporter jusqu'à 50 personnes. SeaBubbles a vendu ses quatre premières bulles, en février (avec une livraison prévue en juillet) à la ville de Miami, en Floride. En dehors des airs et des voies fluviales, c'est également sur les rails que les ingénieurs imaginent le futur. En effet, La SNCF et l'Institut de recherche technologique (IRT) Railenium avec Alstom, Altran, Ansaldo, Apsys, Bombardier, Bosch, Spirops et Thales ont annoncé, en septembre 2018, la création de deux consortiums visant à développer d'ici à 2023, deux prototypes de trains autonomes. Le principe du train ultrarapide dénommé Hyperloop est de faire circuler des capsules pressurisées, ou « pods », dans des tubes à basse pression pour s'affranchir des frottements aérodynamiques et frôler le mur du son. Des prototypes de trains autonomes en 2023 Avec ce projet de rupture, le groupe public se lance dans la construction du système ferroviaire de demain. En devenant le premier opérateur à exploiter des trains autonomes pour le fret comme pour le transport de voyageurs, la SNCF et ses partenaires positionneraient la France à l'avant-garde de l'innovation dans le secteur. Deux consortiums rassemblant des entreprises technologiques et industrielles ont été créés en janvier 2018 et sont pilotés par la SNCF et l'IRT Railenium jusqu'en 2023. Un consortium est dédié à la réalisation d'un prototype de train de fret autonome. Il réunit Alstom, Altran, Ansaldo et Apsys. Un autre consortium, dédié aux voyageurs, réalise un prototype de train TER autonome. Il se compose de Bombardier, Bosch, Spirops et Thales. Le budget de cette phase de projet s'élève à 57 millions d'euros : 30 % sont financés par la SNCF, 30 % par l'État et 40 % par les partenaires. Les accords de partenariat réunissent de grands industriels issus du ferroviaire, de l'automobile, de l'aérien, de l'intelligence système, des acteurs de l'ingénierie et de l'intelligence artificielle. Ils bénéficient d'un fort soutien de la puissance publique, via l'Agence nationale de la recherche (ANR). L'Établissement public de sécurité ferroviaire (EPSF) et l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI) sont associés à chacun de ces consortiums afin d'y intégrer pleinement et au plus tôt les enjeux de sécurité ferroviaire et de cybersécurité. Toutes ces expertises permettent d'aller plus loin dans des domaines clés du futur train autonome : détection d'obstacles, lecture de la signalisation, géolocalisation, surveillance de l'environnement, du train, et gestion des aléas. L'automatisation des trains se traduit par des bénéfices concrets pour les voyageurs et les clients du fret : une plus grande capacité (faire rouler plus de trains, c'est pouvoir transporter plus de personnes et de marchandises), plus de fluidité et de régularité (grâce à une circulation harmonisée et une vitesse optimisée permettant de mieux faire face aux imprévus) et une plus grande ambition écologique grâce à une diminution de la consommation d'énergie. L'objectif du projet « train autonome » est de mettre en circulation des trains fret semi-autonomes d'ici fin 2020 et des trains entièrement automatisés d'ici à 2023. Le déploiement de trains autonomes concernera dans un premier temps le fret et le Transilien, puis les TGV et les TER à partir de 2025. Dans le cadre du projet de train autonome de la SNCF, l'IRT Sys-temX, la SNCF, Alstom et Systra ont lancé, en octobre dernier, le projet DOS (Détection d'obstacles et lecture de la signalisation latérale) pour concevoir et valider un système sécuritaire d'automatisation des fonctions d'observation du conducteur de train. Le projet DOS s'inscrit dans la continuité du projet « Transport terrestre autonome en sécurité dans son environnement » (TAS) dont le but était d'automatiser les fonctions d'observation du conducteur de train et d'en faire la démonstration concrète. Le projet DOS va plus loin et vise à augmenter les performances du système de détection des obstacles et de la signalisation latérale, notamment en termes de qualification, validation et démonstration de sa sécurité. L'automatisation des fonctions d'observation du conducteur constitue un verrou technologique majeur à lever pour le train autonome. C'est précisément l'enjeu de ce projet multipartenarial d'innovation et de recherche d'une durée de trois ans. Plusieurs projets Hyperloop en France Se déplacer toujours plus vite, tel sera également l'ambition des entreprises de transport avec des trains qui iront bien plus vite que les TGV actuels. En décembre 2018, la mairie de Droux, en Haute-Vienne, avait délivré un permis de construire pour un centre d'essai de l'Hyper-loop, ou train subsonique du futur, qui ambitionne à terme de propulser les voyageurs à quelque 1 000 km/h dans des sortes de « tubes ». Le permis, en date du 30 novembre 2018, prévoit la création d'un bâtiment technique et de maintenance et d'un bâtiment de réception, reliés par un tube de près de 3 km de long, sur une surface totale de 1 753 m 2 . Les travaux pourraient débuter au printemps 2020. L'Hyperloop est porté par la startup canadienne TransPod travaillant au développement de la technologie Hyperloop en Europe. Le principe de ce train ultrarapide est de faire circuler des capsules pressurisées, ou « pods », dans des tubes à basse pression pour s'affranchir des frottements aérodynamiques et frôler le mur du son. Sébastien Gendron, cofondateur et PDG de TransPod, basée à Toronto, expliquait que la « piste » d'essai doit permettre « de tester en conditions réelles, à échelle un demi, la technologie Hyperloop développée par TransPod ». L'adjoint au maire de Limoges avait l'intention de créer une association « Hyperloop France » afin de défendre le projet au-delà des frontières de la Haute-Vienne. Le projet, de 21 millions d'euros, est financé à 100 % par des investisseurs privés dans le cadre d'une levée de fonds de plus de 50 millions d'euros conduite par Trans-Pod, avait indiqué l'entreprise, annonçant des partenaires industriels français et internationaux à venir. Mais à la fin de l'année 2019, les travaux du centre d'essai de l'Hyperloop accusaient un sérieux retard. En effet, selon France 3 Nouvelle-Aquitaine, sur les 20 millions d'euros nécessaires au projet de centre d'essai du train subsonique, il en manquerait deux. Si des fonds privés d'investisseurs canadiens ont déjà été récoltés, ce sont les fonds publics qu'attend l'entreprise Trans-Pod. La région a fait une demande de fonds européens afin de boucler le budget. À Toulouse, il existe un autre projet de train Hyperloop, également en cours. Installée depuis 2018 dans la ville rose, la société Hyperloop TT prévoyait d'effectuer ses premiers tests de capsule avec passagers sur une piste d'essai de 320 mètres de long dans le courant de l'année 2020. Mais elle reste très discrète sur l'avancée de ce projet.

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