Couverture ElectroniqueS n°127

LES FABRICANTS D'INSTRUMENTS DE TEST ET DE MESURE ONT PROFITÉ DE LEUR EXPÉRIENCE ACQUISE AVEC LA 4G POUR METTRE SUR LE MARCHÉ DES APPAREILS DE TERRAIN. SI DE NOMBREUX POINTS SONT COMMUNS, LA 5G NEW RADIO (NR) NÉCESSITE TOUTEFOIS D'ADAPTER LES GAMMES DE FRÉQUENCES, LA BANDE PASSANTE ET LA PUISSANCE DE CALCUL TOUT EN ASSURANT UNE SIMPLICITÉ D'UTILISATION. Depuis plusieurs années, la 5 e génération des normes pour la téléphonie mobile, que l'on appelle plus communément la 5G, fait fantasmer les fabricants d'équipements et de smartphones, les opérateurs de télécommunications et une myriade de sociétés proposant des produits et/ou des services basés sur l'Internet des objets (IoT), le véhicule autonome ou les smart cities. Avec des débits descendants susceptibles d'atteindre 1 Gbit/s, voire jusqu'à 2 Gbit/s, et des temps de latence promis en dessous de 1 milliseconde, il est vrai que cette nouvelle technologie a de quoi aiguiser l'appétit de nombreux acteurs. Ce sont d'abord les organisations de standardisation, accompagnées de très près par les principaux acteurs du test et de la mesure (voir Electroniques n°88), puis les fabricants de chips, qui se sont lancés dans la bataille. Une première étape essentielle avait été franchie à la fin de l'année 2018 avec l'approbation de la spécification 5G New Radio (NR) non autonome (non standalone ou NSA) implémentable par la 3GPP (3 rd Generation Partnership Project). En parallèle de la conception des différents éléments d'infrastructure et de terminaux mobiles, fabricants et opérateurs se sont associés, sur des sites pilotes, pour tester in situ la technologie 5G NR. C'est notamment le cas en France où l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) a autorisé des expérimentations à Lille, Douai, Bordeaux et Lyon en février 2018, puis à Marseille, Nantes, Toulouse et en Île-de-France en juin et juillet 2018. À la suite du dépôt de leur dossier de candidature pour l'attribution des fréquences de la bande 3,4-3,8 GHz en France métropolitaine, Bouygues Telecom, Free Mobile, Orange et SFR ont été qualifiés pour participer aux enchères prévues initialement en avril 2020. Mais en raison de la crise sanitaire liée au coronavirus Covid-19, les enchères ont été repoussées sine die. « Malgré la situation, les opérateurs associés aux constructeurs d'équipements ont continué à déployer et à tester des réseaux d'essais, car la 5G représente un enjeu capital pour le pays. Ils sont demandeurs d'informations et comptent sur nous, acteurs du test et de la mesure, pour leur permettre d'apprendre. Au-delà de nouveaux acronymes – FR1 et FR2, gNodeB, le nom officiel d'une station de base, SA et NSA, SSB, etc. –, le déploiement de la 5G NR nécessite des investissements très importants », constate Cyril Noger, RF & Wireless Products Support Engineer chez Anritsu France. D'autres pays ont d'ores et déjà déployé, au moins partiellement, leur réseau 5G NR, à l'instar de la Chine, de la Finlande, de l'Allemagne, de Hong Kong ou des États-Unis. Si les outils de caractérisation et de validation en laboratoire ont été disponibles dès que les fabricants de puces en ont eu besoin, qu'en est-il aujourd'hui des moyens de test et de mesure destinés à accompagner le déploiement des gNodeB et des autres équipements sur le terrain ? TROIS CIBLES : L'EMBB, LES URLLC ET LES MMTC « La mise en œuvre de la vision 5G implique d'abord une refonte majeure des normes de communication sans fil, et deuxièmement, un travail de déploiement, d'optimisation et d'évolution d'un réseau compatible 5G NR. Le travail sur les normes est en cours. Cela a commencé par la version 15 du 3GPP (Rel15), qui a été achevée l'année dernière, se poursuit avec Rel-16 (qui doit être terminé cet été) et Rel-17 (qui devrait être prêt à l'automne 2021) », explique Renaud Duverne, vendeur spécialiste pour les opérateurs télécoms et 5G chez Keysight Technologies. Les bandes de fréquences ouvertes à la 5G NR se distinguent entre deux catégories : la FR1 correspond aux fréquences comprises entre 410 MHz et 7,125 GHz et la FR2, aux fréquences millimétriques (24,250 et 52,600 GHz), couvertes par la solution basée sur les analyseurs de spectre FieldFox N99xxB de Keysight Technologies. Un modèle simplifié d'un réseau 5G est constitué d'appareils mobiles, ou « équipements utilisateur » (UE), du réseau d'accès radio (radio access network ou 5G-RAN) avec les stations de base radio et leurs fonctions de contrôle, et du cœur de réseau (core network) de nouvelle génération (new generation core ou NGC), qui comprend les fonctions de routage des messages Internet mobiles, les passerelles vers les réseaux externes et les fonctions domestiques liées à l'authentification et à la facturation. « La 5G NR se caractérise notamment par un nouveau design pour le 5G-RAN, avec des spécifications d'interface radio mises à jour pour une mobilité – la vitesse physique des UE – et des débits de données plus élevés, l'adaptation de nouvelles bandes de spectre de fréquences, une utilisation plus flexible (et donc plus efficace) du spectre, une latence de message plus faible, une densité de connexion et une fiabilité plus élevées », énumère Renaud Duverne. Parmi les autres caractéristiques principales de la 5G NR, on trouve une nouvelle conception pour le NGC qui tient compte de tout ce que l'on vient de lister et, plus encore, de permettre la personnalisation de « tranches » virtuelles (network slicing) de fonctionnalités réseau pour des cas d'usage (use cases) spécifiques. Pour Samuel Bureau, Director EMEA Solutions Specialists Organization-Broadband Networks de Viavi Solutions, « on identifie trois grands “piliers” : l'eMBB (enhanced mobile broadband), les URLLC (ultra-reliable low latency communications) et les mMTC (massive machine type communications), à savoir les objets connectés (IoT). Il faut donc que l'architecture réseau soit plus performante et que le réseau soit optimisé ». « Les entreprises qui n'utilisaient pas auparavant les communications sans fil peuvent s'attendre à voir les services offerts par les opérateurs de réseaux mobiles basés sur des “tranches” dédiées du réseau, telles que la diffusion vidéo en liaison descendante ou les communications de type machine à haute fiabilité. Toutes deux sont exécutées sur le même réseau physique, mais utilisées par des entités très différentes et dans des modèles commerciaux différents », poursuit Renaud Duverne (Keysight Technologies). Il ne faut toutefois pas faire abstraction de tout ce qui a été mis en œuvre pour les tests et la mesure des réseaux 4G, bien au contraire. Les technologies 4G et 5G ont en effet de nombreux points en commun, même si la spécification 5G diffère sur plusieurs aspects pour répondre aux critères de débit ou de latence annoncés. Pour Didier Pertuis, responsable produits mesure de couverture et test des mobiles chez Rohde & Schwarz France, « ces différences peuvent se résumer en quatre grandes catégories : la bande de fréquences, la multi-connectivité, la flexibilité et la méthode Massive MIMO . » Un CAGR de 11,5 % pour le marché du test 5G Selon la société d'analyse américaine Frost & Sullivan, le marché mondial des équipements et solutions de test 5G devrait atteindre un montant de 2 milliards de dollars en 2024, avec un taux de croissance annuel composé (CAGR) de 11,5 %. Un CAGR à deux chiffres entre 2018 et 2024 n'est pas en contradiction avec la croissance paraissant lente dans certains segments, car, au départ, le réseau 5G déployé commercialement n'aura pas toutes ses fonctionnalités. Le déploiement de la 5G non standalone (non autonome) précédera une évolution vers le mode autonome et des capacités complètes de 5G. « Au fur et à mesure que de nouvelles fonctionnalités permettant des cas d'usage de l'IoT s'ajouteront à la 5G, cela influencera la demande en équipements de test utilisés pour tester ces fonctionnalités spécifiques de l'Internet des objets (IoT ) », explique Rohan Joy Thomas, analyste de l'industrie pour la mesure et l'instrumentation chez Frost & Sullivan. Il poursuit en précisant que « la pression pour une plus grande bande passante nécessitera une amélioration de la technologie à fibre optique, ce qui stimulera la demande d'équipements de test en fibre optique. Alors que la 5G continue de gagner en force, la nécessité de tester des solutions capables de valider les performances des données haute densité augmentera également. » Enfin, le cabinet d'études prévoit que, d'ici à 2024, 42,8 % du total du chiffre d'affaires en test 5G proviendront de la région Asie-Pacifique, 33,8 % d'Amérique du Nord et 18,1 % d'Europe. DE NOUVELLES BANDES DE FRÉQUENCES La recherche de débits élevés, donc de bande passante plus large, se traduit par un besoin de place dans le spectre radio existant, qui est déjà partagé par de nombreuses industries et applications. Pour la France, l'organisme de réglementation français (l'Arcep) a commencé des travaux pour définir les bandes de spectre pour la 5G NR. « Étant donné que les licences disponibles sont déjà utilisées pour les générations précédentes, la plupart des gouvernements attribuent ou mettent aux enchères de nouveaux spectres. La 5G NR sera implémentée dans plusieurs bandes de fréquences : celles utilisées aujourd'hui par les générations précédentes (3G, LTE, etc.), de nouvelles bandes ouvertes à l'utilisation de la 5G NR et des bandes sans licence, comme ce qui a été récemment mis en œuvre pour la 4G dans le cadre d'un accès assisté sous licence (LAA) », liste Renaud Duverne (Keysight Technologies). Il existe deux types de bandes de fréquences ouvertes à la 5G, que l'on désigne par FR1 (pour frequency range) – elles vont de 410 MHz à 7,125 GHz, d'où le terme anglais « sub-6GHz » – et FR2 – les fréquences millimétriques vont de 24,250 à 52,600 GHz. « La nouvelle bande en FR1 correspond aux fréquences comprises entre 3,4 et 3,8 GHz ; c'est elle qui fait l'objet des enchères et des premiers déploiements. Dans un second temps, les opérateurs pourront mettre en œuvre la bande FR2 24,25-27,5 GHz, fréquences nouvelles en communications mobiles. Même si des essais sont déjà en cours aux fréquences autour de 26 GHz, aucune date n'est pour l'instant définie pour l'allocation de la bande FR2 par l'Arcep », précise Didier Pertuis (Rohde & Schwarz France). « À l'image de Verizon qui a déjà déployé la 5G en FR2 aux États-Unis, cette bande est destinée à des applications de très haut débit, dans des cas d'usage bien ciblés (communications point-à-point statiques), et non à des applications mobiles. Mais les fréquences millimétriques représentent un sacré défi pour les opérateurs, car ces derniers n'ont pas encore l'expérience de la propagation des ondes à de telles fréquences. ACD (« automatic channel detection »), DSS (« dynamic spectrum sharing »), position géographique des gNodeB, mesures de synchronisation du réseau, niveaux de champs électromagnétiques, etc. Les appareils de test pour le terrain doivent contrôler un grand nombre de paramètres différents dans les réseaux 5G NR. Plus elles sont élevées, plus les pertes dans l'air sont importantes, par exemple », ajoute Cyril Noger (Anritsu France). À noter que chaque pays a une occupation distincte de son spectre radio, en raison de régulations propres. C'est ce qui explique que les fréquences ne sont pas exactement les mêmes selon les pays. Pour rendre les choses encore plus souples, ou complexes selon le point de vue adopté, la 3GPP a par ailleurs prévu des bandes de fréquences complémentaires pour se laisser un peu plus de place encore. « Ces bandes LTE sans licence, autour de 700 MHz, permettront de partager des bandes lors du déploiement et, autre avantage, de réduire les atténuations du signal », souligne Frédéric Molina, ingénieur d'applications en analyse de spectre chez Rohde & Schwarz France. « Pour les analyseurs de spectre portables et autres appareils de test pour le terrain, la grande majorité d'entre eux supportent depuis plus ou moins longtemps les fréquences jusqu'à 6 ou 7 GHz. Mais l'extension aux fréquences millimétriques (FR2) va fondamentalement modifier les choses pour tous les acteurs, à l'image de l'évolution vers les tests OTA (over-the-air), afin de s'affranchir du problème de fiabilité liée à la connectique millimétrique », constate Renaud Duverne (Keysight Technologies). Certains analyseurs de spectre portables FieldFox N99xxB (voir Electroniques n° 112) de l'américain couvrent les fréquences de 9 kHz à 26,5 GHz – les versions A atteignent même 50 GHz – et disposent, en mode analyse de spectre en temps réel, d'une largeur d'analyse instantanée jusqu'à 100 MHz (option B10) et d'une fonction 5G NR OTA (option 378). DES LARGEURS D'ANALYSE JUSQU'À 100 OU 400 MHz La multi-connectivité évoquée précédemment par Didier Pertuis (Rohde & Schwarz France) prend la forme des versions nonstandalone (NSA) et standalone (SA) de la 5G NR. « Dans la première “version” de la 5G déployée en France, un smartphone 5G NSA devra s'être accroché à un réseau LTE pour établir une communication 5G. Un smartphone 5G SA, lui, n'aura pas besoin de cet ancrage LTE pour se connecter en 5G », explique Cyril Noger (Anritsu France). C'est l'un des inconvénients majeurs de la version NSA : même en ayant des gNodeB mais aucune station de base LTE à proximité, un smartphone 5G NSA ne fonctionnera pas en 5G. « Cette double connectivité définie dans les recommandations d'implémentation (option 3), avec laquelle presque tous les pays vont commencer, permettra d'optimiser le réseau LTE en déchargeant une partie des données vers la nouvelle technologie, du moment que les smartphones sont compatibles 5G NSA. En plus d'assurer une transition en douceur entre la 4G et la 5G NR, les opérateurs seront en mesure de mener à bien les changements nécessaires vers un cœur de réseau de nouvelle génération pour adresser directement la 5G », poursuit Didier Pertuis (Rohde & Schwarz France). La 4G et la 5G NR peuvent coexister dans un environnement NSA – les deux RAN sont connectés au même evolved packet core (EPC), mais sur des bandes de fréquences différentes, avec l'approche de partage dyna-mique du spectre (dynamic spectrum sharing ou DSS). Il s'agit d'une capacité normalisée dans le 3GPP, qui permet à une seule station de base d'allouer dynamiquement des groupes de sous-porteuses dans une seule bande de 20 MHz, par exemple, à la 4G, et d'autres groupes à la 5G NR. Cela peut ensuite être modifié en fonction des appareils qui dominent le trafic dans la cellule au cours des secondes, des minutes, des jours, etc. « Le DSS va ainsi également contribuer à la transition 4G/5G », précise Samuel Bureau (Viavi Solutions). Comme nous l'évoquions précédemment, l'utilisation de fréquences supplémentaires a pour but d'accroître les débits descendants et montants, ce qui requiert des largeurs de bande plus importantes – plus larges sont les bandes, plus élevé est le nombre de bits par Hertz transmis. Avec une cellule LTE (4G), les largeurs de bande sont comprises entre 5 et 20 MHz. En 5G NR, elles s'étendent de 10 à 100 MHz, pour les fréquences inférieures à 6 GHz, et de 50 à 400 MHz pour les fréquences millimétriques – la cellule est alors beaucoup plus petite. En désagrégeant les gNodeB, les opérateurs recherchent des solutions de test pour valider l'interopérabilité entre les unités RU, DU et CU séparées. L'ONA-800 de Viavi Solutions remplace un analyseur de câble et d'antenne, un OTDR, un analyseur CPRI et un microscope pour l'inspection des fibres optiques. « Nous avons dû reconcevoir la plateforme de nos analyseurs de spectre portables Field Master Pro MS2090A , avec par exemple des numériseurs plus performants, pour atteindre une gamme de fréquence de 9 kHz à 54 GHz et une largeur d'analyse instantanée maximale de 110 MHz (option 104 ou 106). Un analyseur de spectre en temps réel permet ainsi de visualiser en permanence tout ce qui se passe dans le signal – l'événement détectable le plus bref est de seulement 5 ns –, contrairement à un analyseur de spectre traditionnel, même si ce dernier balaie rapidement le spectre », explique Cyril Noger (Anritsu France). PRENDRE EN COMPTE LA FLEXIBILITÉ Au-delà de la 5G NR proprement dite, les appareils de test et de mesure devront également prendre en compte les évolutions des autres normes de communications. « Le 23 avril dernier, la FCC a voté en faveur de l'extension du spectre sans licence du Wi-Fi dans les fréquences de 6 GHz, en plus des bandes 2,4 et 5 GHz. Une fois approuvée, cette nouvelle norme Wi-Fi 6E permettra d'étendre la bande à 1 200 MHz et la latence à moins de 1 ms, donc de supporter des hausses de débits, comme c'est le cas aujourd'hui où beaucoup de personnes travaillent à domicile en raison de l'épidémie de Covid-19 », constate Amr Haj-Omar, Wireless Market Segment Leader chez Tektronix. En augmentant ainsi la capacité des applications à faible consommation, il sera possible de décharger les données cellulaires des applications de réalité augmentée et de réalité virtuelle ou de télémédecine (vêtements connectés ou matériel critique portable pour une surveillance continue) sur le Wi-Fi dans l'industrie 4.0. « Même si la 5G NR et le Wi-Fi 6E partagent le même spectre en dessous de 6 GHz, le second fonctionnera avec une puissance beaucoup plus faible que la première, ce qui assurera une coexistence. Il faudra toutefois mettre en place une surveillance du spectre afin d'éviter les interférences », poursuit Amr Haj-Omar. Les différentes bandes de fréquences, selon le pays ou la zone géographique, et la multi-connectivité ne sont pas les seuls aspects en termes de flexibilité de la technologie 5G. Il faut encore prendre en compte d'autres différences par rapport à la technologie LTE. Alors que de nombreuses formes d'onde ont été proposées, la première phase de la 5G NR utilise une méthode de codage basée sur le multiplexage par répartition en fréquence orthogonale (orthogonal frequency division multi-plexing ou OFDM). « S'il y a eu un changement de schéma de modulation entre la 3G (code-division multiple access ou CDMA) et la 4G (OFDM), on retrouve l'OFDM pour la 5G NR », constate Amr Haj-Omar (Tektronix). La version retenue pour la liaison descendante est le cyclic prefix-OFDM (CP-OFDM), comme pour la 4G, mais la liaison montante de la 5G NR, elle, met en œuvre des formes d'onde basées à la fois sur le CP-OFDM et la méthode discrete fourier transform spread OFDM (DFT-s-OFDM). Une autre différence concerne l'espacement des sous-porteuses. « Chaque bande passante LTE est divisée en sous-porteuses espacées d'une fréquence de 15 kHz fixe. Mais la spécification 5G NR autorise un espacement variable entre sous-porteuses (15, 30 ou 60 kHz en FR1 et 60, 120 et 240 kHz en FR2). Les fabricants choisissent ainsi leur implémentation pour optimiser en temps réel les ressources radio, en fréquence et en temps. Comme le technicien ne sait pas à quelle numérologie il a affaire, l'analyseur de spectre doit scanner la porteuse pour être en mesure de déterminer le SSB (synchronization signal block), paramètre essentiel pour connaître la numérologie en question », explique Cyril Noger (Anritsu France). « BEAMFORMING » ET ARCHITECTURE O-RAN Les appareils de test et de mesure destinés au déploiement de la 5G se doivent de répondre par ailleurs aux évolutions au niveau des gNodeB. Les antennes 5G NR sont en effet en mesure de créer jusqu'à 8 faisceaux (beams) en FR1, et même jusqu'à 64 faisceaux en FR2. « En disposant d'un plus grand nombre de secteurs qu'en LTE, il est possible d'optimiser plus finement la liaison radio – réduire l'atténuation d'air entre l'antenne et les différents UE, par exemple – et donc d'améliorer les communications. Pour y parvenir, les antennes 5G mettent en œuvre les technologies Massive MIMO et beamfor-ming », explique Frédéric Molina (Rohde & Schwarz France). En plus des angles plus petits et plus étroits, les polarisations verticale et horizontale des faisceaux contribuent elles aussi à mieux cibler un UE. « En ce qui concerne les mesures à réaliser, on trouve les tests RF (SSB, interférences, niveaux de champs électromagnétiques, validation des beams, cartographie, etc.), la mesure de latence – nous avons doté nos testeurs du module de synchronisation TEM (antenne GNSS et horloge au rubidium), dont la justesse est de 5 ns –, la mesure de débit, qui est aujourd'hui plus fréquente, et les mesures de fibre optique. Ce ne sont pas de nouveaux tests dans le monde les télécoms, mais ça l'est dans le domaine du mobile », avance Samuel Bureau (Viavi Solutions). Il a parfois fallu que les fabricants repensent la plateforme de leurs appareils de test et de mesure pour qu'ils couvrent les fréquences millimétriques, qu'ils disposent de suffisamment de puissance de calcul pour faire tourner des algorithmes et des applications pour la 5G. Si la fibre optique est arrivée avec la 4G, la CPRI (common public radio interface), qui est l'interface entre le REC (radio equipment control) et le RE (radio equipment), laisse sa place à l'eCPRI (enhanced CPRI) avec la 5G. Pour Amr Haj-Omar (Tektronix), « parmi les différentes mesures que l'on retrouve, telles que l'ACPR (adjacent channel power ratio ou rapport de puissance du canal adjacent) et le SEM (spurious emission mask ou masque d'émission parasite), l'EVM (error vector magnitude ou magnitude du vecteur d'erreur) est de plus en plus utilisé ». Ce paramètre traduit en fait la bonne réception de la communication : plus sa valeur est petite, moins le signal est perturbé et plus il est propre. Le passage du CPRI à l'eCPRI n'est qu'un tout petit aspect des changements intervenant au niveau de l'architecture du RAN. « Le gNodeB comprend la capacité RF et la capacité de bande de base, ainsi que les moyens de communiquer avec le cœur du réseau via l'interface S1. La 5G NR franchit une nouvelle étape en désagrégeant physiquement ces capacités, voire la bande de base via certaines implémentations. En plus des mesures RF (niveaux de champs électromagnétiques, interférences, cartographie…), le déploiement des réseaux 5G NR requiert également des outils de test pour déterminer les performances et la qualité de services, à l'instar de la solution Nemo Outdoor 5G NR de Keysight Technologies. Cette désagrégation permet de virtualiser et de centraliser une partie du RAN pour une plus grande flexibilité du réseau. Il existe actuellement des normes en cours d'élaboration qui créent une interface ouverte entre ces éléments désagrégés », résume Renaud Duverne (Keysight Technologies). Plus concrètement, « les RRH (remote radio head) et BBU (base band unit) que l'on trouvait en 4G sont remplacées par trois composants distincts, séparés et interopérables : les RU (remote unit), DU (distri-buted unit) et CU (centra-lized unit). Les opérateurs ont désormais la possibilité de combiner des unités de marques différentes dans leur fronthaul et backhaul, ce qui n'était pas du tout envisageable avec les équipements 4G. D'où le besoin de solutions de test pour valider l'interopérabilité entre chaque unité », explique Samuel Bureau (Viavi Solutions). On pourrait continuer encore longtemps à lister les évolutions de la technologie 5G NR, mais il faut surtout garder à l'esprit que les appareils de test et de mesure sont prêts pour le déploiement de la nouvelle technologie. Les fabricants ont su relever les défis imposés par les fréquences millimétriques, les nouvelles numérologies et interfaces radio, etc., et anticiper les besoins des fournisseurs d'équipements et des opérateurs, en participant notamment aux écosystèmes de China Mobile et Qualcomm Technologies, ainsi qu'à des consortiums, tels que l'O-RAN Alliance, la NGMN (Next Generation Mobile Networks) Alliance, la 5G Automotive Associate ou le 5G Forum.

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