Couverture ElectroniqueS n°127

SI LES BOUTONS N'ONT PAS TOUJOURS BONNE PRESSE DANS L'INCONSCIENT COLLECTIF, CERTAINS MIEUX PLACÉS QUE D'AUTRES PERMETTENT L'ÉCONOMIE DE PRÈS DE 500 000 EUROS PAR AN SUR UNE CHAÎNE DE PRODUCTION. EXPLICATIONS AVEC ARNAUD HUVELIN, FONDATEUR ET DIRIGEANT DE LA START-UP DECLIQUE. Dans cette usine Liebherr fabriquant des pompes pour l'aéronautique, un opérateur se plaint d'un problème apparemment anodin : ses paniers ne disposent pas toujours des bonnes vis en titane, engendrant de nombreux allers-retours au magasin interne. Finalement, dans l'usine, personne ne peut quantifier les arrêts de fabrication, ni mesurer le temps perdu et son impact financier. Pour Arnaud Huvelin, ingénieur et chef de projet au sein de l'accélérateur toulousain de start-up IoT Valley, alors en visite, le constat est simple : le problème est mineur, alors il n'y a aucun système pour le noter rapidement. Une personne pourrait être embauchée au magasin, à condition de calculer la perte d'argent. Liebherr souhaite mesurer la masse des paniers. Vient alors l'idée d'installer un bouton électronique par problème, pour quantifier les arrêts de fabrication sur trois postes, durant trois mois. Le test se révèle éloquent : l'usine perd 500 000 euros de chiffre d'affaires par an, représentant pour l'opérateur une perte d'une semaine de marche entre son poste et le magasin. UNE ALTERNATIVE AUX FICHES DE NON-CONFORMITÉ Ces boutons sont nommés et personnalisés par rapport aux arrêts choisis : ils fonctionnent en mode « occurrence » et mode « temps », ne demandent pas d'infrastructure, puisque fonctionnant à 99 % avec Sigfox. Les données brutes, transmises quotidiennement sur le Déclique Cloud sécurisé, sont accessibles à tout le personnel sous forme de tableur. « Elles n'ont pas besoin d'être retraitées ou hypothéti-sées, elles restent telles quelles, simples à appréhender, sans nuées de graphes, ni longues explications. » Le service, un abonnement sans engagement, intègre une assistance en ligne, l'alerte et la maintenance préventive. Il constitue une alternative aux fiches de non-conformité, facilitant la prise de décisions budgétaires. Créé en février 2020, Declique a été accéléré pendant un an dans l'IoT Valley, obtenant une levée de fonds d'environ 500 000 euros, dont 175 000 euros par la BPI via la French Tech Seed. Près de 450 boutons installés et 38 000 arrêts collectés plus tard, Arnaud Huvelin et Declique visent 250 clients en 2021 (30 aujourd'hui), se focalisant sur le marché national, même s'il compte aussi des clients allemands, italiens, et bientôt néo-zélandais. À propos, si « les boutons sont achetés sur étagères, via un fournisseur tchèque, ils vont prochainement être fabriqués en France. Nous pouvons nous le permettre, maintenant que la société s'agrandit. » Le fondateur précise : « Nos clients sont des usines du secteur industriel, du tertiaire et de la logistique, mais nous nous focalisons actuellement sur l'agroalimentaire ». Arnaud Huvelin, fondateur de Declique « Ce que je préfère ? C'est lorsqu'un client embauche une personne grâce au bouton, qu'il a pu investir dans une nouvelle machine, pu réorganiser l'usine, ou contribuer au bien-être des opérateurs. ». L'AMÉLIORATION CONTINUE, ESSENTIELLE Revenant au bouton, « il n'y a pas une seule et unique manière de l'utiliser : il y a autant de clients que de manières de l'utiliser ». Pas de manichéisme industriel donc, puisque les acquisitions ne sont pas perdues : « Notre service s'enquiert auprès des clients de la pertinence d'un bouton, de son emplacement, de son nommage, s'il n'a pas été appuyé ». Il ajoute : « Nous mesurons un système qui n'est pas figé. L'industrie, les usines sont des systèmes vivants : tous les jours il se passe des choses, ils bougent, ils évoluent. Nos boutons s'adaptent à l'usine, contrairement aux ERP , aux ensembles systèmes-machines complexes, intégrant des capteurs physiquement figés. » Et de conclure : « J'invite les sociétés à recruter un(e) responsable de l'amélioration continue ; un métier essentiel en usine. Des économies influant sur le chiffre d'affaires sont possibles via le management et la motivation des équipes, mais sont difficilement mesurables. Des opérateurs à qui l'on donne la parole, à qui l'on offre des solutions, autorisent des choses extraordinaires. »

« L’industrie, les usines sont des systèmes vivants : tous les jours il se passe des choses, ils bougent, ils évoluent »

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