Couverture ElectroniqueS n°127

Réunis à Paris le 17 octobre dernier, les industriels de la filière électronique ont encouragé les pouvoirs publics à soutenir davantage l'innovation, la production locale, et le lancement de grands programmes. Lors des 4es Assises de la filière des industries électroniques et numériques (Fien), qui se sont déroulées le 17 octobre dernier au Parc des Expositions de Paris, Porte de Versailles, dans le cadre du Forum de l'électronique, les responsables de la filière n'ont pas relâché la pression sur les pouvoirs publics. Six tables rondes ont été organisées et douze propositions ont été émises dans le but de dynamiser la compétitivité de la France en électronique (voir encadré).Pierre Gattaz, président de la Fien, a d'emblée centré le débat sur le terrain de l'emploi. Citant un rapport d'Alliance TICS, syndicat qui représente les industriels des secteurs des télécommunications et des technologies de l'information, il a précisé que « si la contribution de l'électronique et du numérique à l'activité économique de notre pays était équivalente à celle observée aux Etats-Unis, ces secteurs pour raient induire la création de 300 000 emplois supplémentaires en France au cours des 10 prochaines années. Il a rappelé que, à contrario, la filière, en l'état, perd plusieurs milliers d'emplois par an ». Pour Pierre Gattaz, le remède réside en grande partie dans la volonté des pouvoirs publics de reconnaître l'aspect stratégique des industries regroupées au sein de la Fien. Trois actions ont été proposées et détaillées dans le cadre des différentes tables rondes : le soutien à l'innovation, la défense d'une production à valeur ajoutée en France dans un environnement social et fiscal optimisé, enfin, le lancement de grands programmes stratégiques. Trois exemples de grands programmes ont été abordés : le très haut débit, la télémédecine et la voiture propre.En matière d'innovation, la Fien souhaite un meilleur accès des PME aux pôles de compétitivité et aux programmes de l'AII (Agence de l'innovation industrielle) et déplore que l'investissement de la France dans ce domaine ne soit pas à la hauteur d'autres pays plus volontaristes tels que les Etats-Unis (plus de 10 milliards de dollars engagés pour la R&D dans les technologies de l'information et la sécurité du territoire), le Japon, Taïwan, la Corée du Sud, la Chine et l'Inde.Sur le plan de la production, « il ne s'agit pas de tout produire, mais de choisir des segments qui permettront de dégager de la valeur ajoutée, précise Pierre Gattaz. Par ailleurs, poursuit-il, nous devons nous focaliser sur les procédés qui permettent d'être plus compétitifs, de gagner en réactivité et en qualité, de réduire les cycles et d'améliorer le service rendu aux clients. » Deux sites de production électronique ont particulièrement été cités en exemple pour leur flexibilité et leur compétitivité : Sony Ribeauvillé et Sagem Fougères. Jean-François Maire, directeur du site de Sony Ribeauvillé, a ainsi expliqué que « la production est possible en Europe en vendant une prestation globale englobant les avantages d'une production française, notamment sur le plan de la qualité, du délai de mise sur le marché et de la forte synergie entre ingénieurs de développement et responsables des lignes de production ».L'Europe de la défense et de la sécurité civile reste encore à construireLes 4es Assises de la filière électronique et numérique ont enfin particulièrement insisté sur le rôle important que peuvent jouer les pouvoirs publics français et européens. Prenant l'exemple de la défense, Denis Ranque, p-dg de Thales, a souligné que « l'Etat français a les moyens d'une politique à long terme dans la défense, mais l'Europe n'est pas suffisamment impliquée ». « La France et la Grande-Bretagne concentrent, à elles deux, 50 % des moyens de défense européens et 75 % des dépenses de R&D dans ce domaine. Or, lorsque l'on sait que les Etats-Unis consacrent cinq fois plus de dépenses que l'Europe à la défense, on s'aperçoit qu'il n'existe pas véritablement de stratégie européenne en matière de défense, à la différence de l'aéronautique, a déploré Denis Ranque. En particulier, nous n'avons pas suffisamment tiré les leçons des attaques terroristes du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis. Certes, nous avons renforcé le contrôle des bagages, mais nous ne pourrions pas éviter une attaque similaire en Europe, estime-t-il.De son côté, Robert Havas, président du directoire de l'AII, a tenu à recadrer la mission de son Agence : « Les lancements de grands programmes, tels que vous les souhaitez, ne font pas partie de notre démarche. Nous ne sommes pas des prescripteurs de projets. Nous travaillons à partir des propositions des industriels. Nous n'avons pas à leur dire ce qu'ils ont à faire. » Réceptif à l'argumentation et aux demandes de la filière électronique, François Loos, ministre de l'Industrie, n'a pas pour autant annoncé de nouvelle mesure concrète. Il a estimé que le lancement des pôles de compétitivité et de l'Agence de l'innovation industrielle constitue déjà un coup de pouce important à la filière.12 propositions pour dynamiser la filièreLa Fien, qui estime avoir joué un rôle déterminant dans la création des pôles de compétitivité et de l'AII, espère pouvoir à nouveau influencer les pouvoirs publics à travers 12 propositions :Pour la R&D : développer une proximité étroite entre les laboratoires de R&D et l'industrie ; soutenir davantage la R&D en renforçant le crédit impôt-recherche.Pour le très haut débit : créer un forum dans le but d'élaborer une feuille de route ; mettre en place une politique publique proactive dans un cadre réglementé.Dans le domaine de la santé : coordonner les différents acteurs et créer un groupe de travail interministériel ; appuyer la R&D en microsystèmes et capteurs, composants essentiels dans le domaine des technologies de la santé.Concernant le programme « la voiture propre sur la route intelligente » : mettre en place une réglementation adaptée et incitative ; soutenir la R&D dans les domaines stratégiques (mécatronique, batteries, électronique de puissance).Pour soutenir la production locale : assouplir la réglementation sur le droit du travail, notamment en matière de flexibilité de l'emploi ; diminuer les coûtsDans le cadre d'une plus grande implication des pouvoirs publics : encourager le développement de standards et de régimes de propriété industrielle favorables au développement du secteur électronique ; lancer des grands programmes en France et en Europe pour créer les emplois de demain.

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