Couverture ElectroniqueS n°127

Prise en compte des petits volumes et pérennisation des approvisionnements sont les deux principaux problèmes pointés par les industriels français intégrant des Asic dans leurs produits. Archamps (74) D'un côté, les industriels se plaignent de la rapide obsolescence des technologies « Sur cinq Asic conçus il y a cinq ans, quatre nous sont annoncés technologiquement obsolètes avant 2005 sans que nous ayons de solution de remplacement », lance Didier Piaud, directeur de la R&D de Chauvin Arnoux et de la non-prise en compte des besoins en petits volumes ; de l'autre, les fondeurs, expression prise ici au sens de fabricants de circuits spécifiques, ne sont pas des philanthropes et doivent donc changer régulièrement de technologies(1). Y a-t-il une solution ? Pour tenter d'apporter une réponse à cette question, le C4i, groupement d'intérêt public créé il y a 11 ans (voir encadré), a organisé le 26 juin dernier sur son site d'Archamps, en Haute-Savoie, une journée d'étude sur le thème “ Les enjeux d'une bonne relation fondeurs-clients ”. Même s'il est difficile d'en tirer une conclusion unique, ce séminaire, qui a rassemblé 70 participants, aura eu le mérite de poser le problème et d'amener les différents acteurs à réfléchir ensemble aux solutions possibles. Car des solutions existent. « Pourquoi les fournisseurs de circuits spécifiques accepteraient-ils des petits volumes outre-Rhin et pas en France ? », s'interroge Jean-Michel Thenard, directeur de C4i, en pointant du doigt la faiblesse des aides apportées en France aux PME-PMI désireuses d'intégrer un Asic dans leur produit : « Des aides tout justes suffisantes pour le développement d'une carte, précise M. Thenard, ce qui explique qu'en France la majorité des développements concerne des cartes, ce qui n'est pas le cas en Allemagne, où le tissu industriel est pourtant au moins aussi morcelé que dans l'Hexagone. » Mais outre-Rhin, le Fraunhofer, qui joue un rôle sensiblement équivalent à celui de C4i, emploie 200 personnes contre seulement 12 pour le groupement français.Ne pas se laisser entraîner par la mode« Pour développer un Asic aujourd'hui, il faut avoir la volonté de le faire, et l'avantage apporté par ce dernier doit être énorme », ajoute Christine Bégou, directrice commerciale de C4i. Un avantage qui se mesure en termes de réduction des coûts ou de compétitivité par rapport à la concurrence. Il convient également de respecter certaines règles, explique Jean-Michel Thenard. La première : « Ne pas suivre la mode, surtout celle du marketing des fondeurs. » Deuxième règle, « faire du lobbying auprès des fondeurs », en leur rappelant que des petits volumes multipliés par un grand nombre de clients finissent par faire des gros volumes. Cela dit, les solutions diffèrent aussi selon les technologies. Pour les technologies numériques, qui évoluent beaucoup plus vite que les technologies analogiques et mixtes, et sont donc fréquemment soumises à des problèmes d'obsolescence, ces solutions reposent sur les circuits logiques programmables qui peuvent également satisfaire le besoin de petits volumes.Pour les technologies analogiques et mixtes le problème est plus ardu, mais là aussi il y a des solutions, même si certaines, comme le recours au programme Europractice(2) pour les petits et moyens volumes, sont peu développées en France. « La solution pour les faibles volumes passe par un partenariat avec des centres de conception indépendants », explique Jean-Luc Carton, d'AMI Semiconductor, qui, pas plus que les autres fournisseurs présents à Archamps, ne peut prendre en compte les conceptions générant moins de 1 million de pièces par an. Pour les circuits mixtes en petits volumes (moins de 100 000 pièces par an), la solution d'EM Microelectronic Marin s'appelle MMA (mixed mode array), sorte de prédiffusé analogique. Concernant la pérennité des technologies, outre le fait que les technologies analogiques et mixtes sont beaucoup plus stables que leurs équivalents numériques (l'état de l'art se situe aujourd'hui à 0,35 µm), « les clients doivent s'associer. Si plusieurs industriels utilisent la même technologie, chacun pour des moyens volumes, le fondeur la maintiendra en production », assure M. Thenard. Une autre manière de résoudre le problème consiste à l'anticiper en associant par exemple les acheteurs au processus de choix du fournisseur, affirme de son côté Bernard Garcia, directeur d'EIPM (European Institute of Purchasing Management). La solution passe aussi par le choix technologique : en démarrant aujourd'hui un design en 0,35 µm, la pérennité serait par exemple assurée pour une dizaine d'années.(1) En dehors de toute considération sur le prix des jeux de masques, la technique de fabrication par lots impose des quantités minimales. Un lot de 25 tranches de 150 mm de diamètre avec des circuits de 13 mm2 correspond à au moins 50 000 pièces. « Or, c'est la quantité de production de l'un de nos produits pendant cinq ans », remarque M. Piaud, de Chauvin Arnoux. (2) Europractice est le nom d'un service fourni par un consortium européen réunissant l'Imec en Belgique, le FhG IIS-A en Allemagne et le CLRC en Grande-Bretagne. Par le biais des circuits multiprojets (CMP), ce service permet aux industriels d'accéder facilement et à moindre coût à l'offre des fondeurs (AMIS, Austriamicrosystems et UMC).Mission : aider les entreprises à intégrer la microélectroniqueCréé en 1992, le C4i (Centre de compétences en conception de circuits intégrés) est un groupement d'intérêt public détenu à 60 % par le CNRS (IN2P3) et à 40 % par des industriels (Alpes Deis, CTDEC, Lem, Sensorex, SNR, Somfy, SEB-Calor-Tefal, Valeo-DAV) dont l'objectif est d'aider les entreprises à franchir le pas de la microélectronique. Ses compétences vont du simple conseil ou avis à la conception de circuits spécifiques analogiques et mixtes, qui représente 80 % de son chiffre d'affaires. C4i emploie 12 personnes, essentiellement des concepteurs, et travaille avec un grand nombre de fondeurs et fournisseurs de semi-conducteurs, la seule limite étant liée à l'existence chez ces derniers d'un kit de conception Cadence. C4i s'adresse également aux industriels ayant déjà une expérience en microélectronique.

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