Couverture ElectroniqueS n°127

Malgré la pression des acheteurs, la délocalisation à tous crins des productions de la sous-traitance fait place à une stratégie mesurée qui prend en compte l'ensemble des paramètres. Bilan : d'un côté, des retours de fabrication en France, et, de l'autre, des délocalisations de conception… L'industrie européenne vit-elle une décadence inéluctable ? En tout cas, son aura faiblit sous les coups des nouveaux acteurs des pays à faible coût de main-d'œuvre, notamment les pays du Maghreb et la Chine, qui sera, selon toute probabilité, l'un des acteurs majeurs du XXIe siècle. Toutefois, l'amélioration constante des technologies de l'information, d'une part, et l'internationalisation des échanges, d'autre part, laissent également la place à l'innovation en matière de services. A preuve, malgré la pression des services achats, la délocalisation n'est plus inéluctable : plusieurs sous-traitants envisagent même des rapatriements de production en France. Toutefois, à l'inverse, la délocalisation touche des bastions jugés jusqu'alors inattaquables comme la conception de produits : des OEM de l'Hexagone commencent à faire appel à des laboratoires asiatiques. Une fois cette scène campée, il nous faut revenir sur la définition du terme “ délocalisation ”, qui, selon les écoles, inclut ou non la production dans un pays étranger en vue de servir le marché de ce dernier. Pour Richard Crétier, porte-parole du Snese, syndicat français de la sous-traitance, « il y a délocalisation quand on assemble dans un pays autre que le pays d'origine des produits qui reviennent ensuite dans ce pays d'origine ». Cette définition est partagée par la majorité des sous-traitants. D'autres experts optent toutefois pour une définition plus large qui englobe la délocalisation en vue de servir un marché étranger (Chine par exemple). Or, il existe un lien entre l'importance du marché d'un pays et l'aptitude des entreprises de ce même pays à réaliser les achats de composants. « La Chine est intéressante pour de grands volumes et parce que les Chinois se chargent des achats de composants », remarque à ce propos Jean-François Evellin, président du Snese et p-dg de Thealec. Que conserver ou rapatrier en France ? Chez Thealec, deux à trois produits pourraient ainsi être rapatriés de Tunisie en France à court terme. De la même façon, CMS France étudie en ce moment le choix d'une délocalisation, ou d'un maintien de la production à Louviers, d'une série de 400 000 à 500 000 pièces sur 6 mois, série dont les produits incluent des composants CMS. La personnalisation de produits gagne aussi du terrain. « Auparavant sous contrôle de sociétés de transport (Fedex, UPS…), le marché de la personnalisation prend de l'ampleur chez les sous-traitants parce qu'il requiert de plus en plus de technicité », explique ainsi M. Bobin. Chez CMS France, la personnalisation pourrait, à l'avenir, représenter de 10 % à 20 % du chiffre d'affaires. « D'une manière générale, la mondialisation a pour conséquence un panachage de la production : un client fait assembler des cartes dans une usine, fait fabriquer les ensembles complets dans une autre, confie les tests à une troisième et la personnalisation et l'implémentation logicielle à CMS France… » Face à la concurrence des pays à faible coût de main-d'œuvre, la France n'est donc pas démunie. Les sous-traitants de l'Hexagone tablent notamment sur leur réactivité et leur capacité de prise en charge globale des projets. Beaucoup améliorent leur offre : achats, logistique, SAV… Il faut aussi que le sous-traitant accentue son rôle de conseil en repérant et en soutenant les idées susceptibles de déboucher sur des productions de grands volumes. D'autant que de nouveaux marchés se font jour en Europe, notamment dans les domaines du maintien à domicile des personnes âgées, de la sécurité routière… Surtout, « il faut soigner la conception car c'est à ce stade que l'on peut réduire les coûts, rappelle M. Benhamou, qui estime que la production dans les pays à bas coût de main-d'œuvre est trop souvent un moyen de masquer un manque de performance lors de la conception ». Si, par exemple, une conception supporte les boîtiers 04/02 plutôt que les 06/03, les coûts de matière seront réduits. De la même manière, M. Bedouin met l'accent sur l'importance de l'introduction de nouveaux produits (NPI), activité qui sert d'interface entre la conception et la production. Ce ne sont pas les responsables de TES, nouveau venu en sous-traitance, qui insistent sur la conception et l'introduction de nouveaux produits (voir notre numéro du 10 février dernier), qui les contrediront. « Il faut tenir compte des coûts associés aux risques et aux aléas, à l'immobilisation… », déclare Georges Bobin, directeur général de CMS France. « Nous devons mieux appréhender les coûts cachés comme le temps consacré par le personnel français à la délocalisation… », indique Jean-François Evellin, président du Snese. BSE a une part dans le capital de Betronic, société tunisienne qui s'appuie sur une usine basée à Bizerte. A gauche, Patrick Guérinel, directeur commercial de BSE, et, à droite, Marc Balassaud, directeur général adjoint de BSE, sur le site tunisien.

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