Couverture ElectroniqueS n°127

Le passage au sans-plomb obnubile l'ensemble des acteurs de la supply chain, qui, du coup, font passer au second plan des signes avant-coureurs de ce qui pourrait se traduire par de fortes tensions, voire une pénurie, dans l'approvisionnement en composants en début d'année prochaine. Le passage au sans-plomb semble faire écran aux problèmes inhérents à la cyclicité du marché des semiconducteurs. Pour tant, « les délais d'obtention des composants même triviaux type logique 74 ont augmenté : il faut compter de 8 à 10 semaines maintenant contre de 4 à 6 semaines auparavant », constate Vincent Cellard, vice-président Europe Assets Management chez Silica (Groupe Avnet). Aussi ce distributeur a-t-il augmenté ses stocks de produits sans plomb. Tout comme EBV Elektronik et Future Electronics. « On ne constitue plus de stocks de produits non conformes à la directive », poursuit M. Cellard. « Nous ne nous fournissons plus en composants non conformes excepté pour des clients qui s'engagent sur des volumes », surenchérit Gérard Lallemand, directeur commercial d'EBV Elektronik France. Le déstockage de composants au plomb a d'ailleurs commencé. Selon des brokers, Arrow aurait mis en vente une partie de son stock de composants non conformes à la directive. Pourtant, même s'ils prennent le maximum de précautions, les distributeurs risquent de se retrouver avec des stocks de composants plombés sur les bras.Les sous-traitants aussi épuisent progressivement leurs stocks de produits plombés. « Nous consommons davantage de composants que nous en achetons, avoue Michel Tohier, directeur des achats du groupe Asteel. Pour nous, c'est une année de déstockage », conclut-il. Ceux des sous-traitants qui travaillent dans des domaines exemptés (automobile, aéronautique, équipements de sécurité, militaire, une partie du médical) prévoient que, malgré tout, leurs clients passeront au sans-plomb dans les deux années à venir. Du fait d'une raréfaction des composants traditionnels au plomb. « Nous ne savons pas, à l'heure actuelle, si les fabricants vont cesser de fabriquer des composants non conformes ou s'ils vont continuer d'en produire pour les marchés exemptés », souligne, à ce sujet, Marc Lopez, directeur de Future Electronics France. Quant aux fabricants de composants, de même que les autres acteurs de la supply chain, ils sont tentés de se débarrasser d'abord de leurs stocks de composants plombés auprès de leurs clients.Sursaut de la demande en 2006 ?« Depuis un an et demi, nous faisons de l'information/formation à tous nos clients », nous a, par exemple, annoncé Eric Burnotte, responsable grands clients chez CMS France (rachetée par Attel). « En décembre, environ 70 % de notre production sera conforme RoHS ; les 30 % restants le seront dans peu de temps », indique M. Burnotte. Dans la pratique, CMS France a séparé son stock en deux parties : les composants conformes à la directive et ceux qui ne le sont pas.Si les composants triviaux (commodities) sont déjà tous proposés en version sans plomb en remplacement ou en parallèle avec des modèles au plomb, ce n'est pas le cas pour les composants sophistiqués. « Plus les technologies en jeu sont pointues, moins on trouve de versions sans plomb », note M. Cellard. Bien que la situation évolue vite, des distributeurs nous ont déclaré ne pouvoir recevoir des nouveaux composants complexes pour test qu'en mars prochain. Ce qui semble un délai court pour pouvoir commercialiser ces produits à grande échelle en juillet ! « Les problèmes concernent tout particulièrement les boîtiers BGA », précise M. Cellard. « Le boîtier BGA sans plomb ne pose pas de problème et est fiable », réplique toutefois Jon Lanson, Senior Vice President GM Europe & SE Asia d'Amkor Technology. Ce serait la conjugaison de plusieurs demandes par le client (renforcement de la tenue aux chocs au niveau des billes en plus de la tenue en température), en particulier de la part des fabricants de téléphones portables, qui pourrait à la limite poser problème.In fine, des retards possibles dans l'approvisionnement de certains composants conjugués avec un réveil de la demande en sans-plomb des équipementiers clients pour raient avoir pour conséquence une montée subite de la demande de composants sans plomb au premier trimestre prochain. Or les usines de production de semiconducteurs tournent aujourd'hui à plein régime pour les circuits sophistiqués. Aussi, les fabricants de composants et en particulier les fabricants de semiconducteurs, qui ont globalement diminué leurs stocks (voir EI n° 615) et dont les capacités sont déjà engorgées, ne pourraient plus alors répondre à cette nouvelle demande. « Ce n'est pas parce que les taux d'utilisation sont très élevés que c'est la catastrophe : une bonne gestion permet le travail en flux tendu », remarque toutefois, philosophe, Jean-Marie Marmet, responsable des achats de composants électroniques chez Seb.Des incertitudes demeurentLes délais d'approvisionnement en certains semiconducteurs augmentent.Les distributeurs et les sous-traitants ne constituent plus de stocks de produits non conformes à la directive. Toutefois, les distributeurs ne savent toujours pas si les fabricants vont cesser de produire des composants au plomb ou s'ils vont continuer à en fabriquer pour les marchés exemptés.Certains fabricants n'apposent pas de marque distinctive sur les composants RoHS. Un problème pour les distributeurs et les industriels, qui doivent prendre en charge le travail d'identification.Des acheteurs indiquent des retards dans l'approvisionnement en certains composants complexes en sans-plomb.Une forte demande en composants sans plomb au 1er trimestre 2006 pourrait déclencher de sérieuses difficultés d'approvisionnement, voire une pénurie, les usines de semiconducteurs tournant déjà à plein régime.Les goulets d'étranglement du sans-plombCertains acheteurs nous ont fait part de difficultés dans l'obtention de composants complexes sans plomb.Le passage au sans-plomb intervient alors que les usines de production de semiconducteurs tournent à plein régime.Les fabricants, les distributeurs et les sous-traitants cherchent à se débarasser de leurs stocks de composants au plomb.

Le passage au sans-plomb masque la pénurie potentielle de composants

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