Couverture ElectroniqueS n°127

Face à l'évolution très rapide des fonctionnalités d'un téléphone portable, la carte à puce traditionnelle de type SIM doit s'adapter. Mais elle n'est plus la seule sur ce marché et la concurrence s'aiguise : les cartes mémoire MMC et SD deviennent plus sécurisées que par le passé, avec des capacités mémoire bien supérieures à celles de la carte SIM. Mais cette dernière est loin d'avoir dit son dernier mot. Pour lire cet article en .Pdf : cliquez ici Chargée d'assurer l'authentification et l'accès au réseau de l'utilisateur d'un téléphone portable, la carte SIM (Subscriber identity mobile) est devenue le lien privilégié des opérateurs avec leurs clients. Son niveau élevé de sécurité allié à une taille réduite en fait un standard bien établi toujours maintenu par l'Etsi. Mais face aux évolutions des architectures des téléphones portables et des nouveaux services proposés par les opérateurs, cette carte doit évoluer en intégrant notamment de plus grandes capacités mémoire, 128 Ko, 1 Mo, 16 Mo voire 32 Mo. Son format fait aussi l'objet de débats : faut-il le réduire ou l'étendre à des formats de cartes flash ? En effet, la carte SIM n'est plus la seule à revendiquer cette fonction sécurité qui crée un lien fort entre l'utilisateur et l'opérateur. Plusieurs options technologiques sont ouvertes pour les futures générations d'équipements mobiles. Par exemple, Renesas Technology a été le premier à annoncer cette année une carte flash au format MMC (MultiMedia-Card) qui intègre un microcontrôleur de cartes à puce. C'est début octobre 2004 que Matsushita Electric a présenté une carte au format SD Card, dite « Smart SD », combinant un circuit mémoire en technologie Fram (1) adaptée au sans-contact et une mémoire flash. Avec l'annonce faite également en octobre de sa carte MegaSIM, M-Systems propose, quant à lui, de porter les capacités mémoire d'une carte SIM classique à 16 Mo (contre un maximum actuel de 1 Mo). Et Infineon puis Samsung ont annoncé chacun, au dernier salon Cartes, un microcircuit pour cartes SIM embarquant 1 Mo de mémoire flash avec des extensions envisagées jusqu'à 20 Mo chez le premier. Samsung a montré aussi de son côté un prototype embarquant 128 Mo de flash NAND associée à un contrôleur 32 bits dans un boîtier MMC compatible avec une interface USB 2.0 ! La question de pose donc : comment cartes mémoire flash et cartes SIM vont-elles à l'avenir cohabiter ou coexister dans les téléphones mobiles ? Pour Marc Chancerel, en charge chez Gem-plus du Business Innovation Group, « la cohabitation entre la carte SIM et la MMC ou la SD est envisageable. A la première, la sécurité, et à la seconde, la portabilité et les grandes capacités de stockage ». Mais « quid » alors d'une carte SIM capable d'embarquer elle-même plusieurs mégaoctets de mémoire flash, ou bien d'une carte mémoire flash dotée des mêmes caractéristiques de sécurité qu'une carte à puce classique ? Le débat n'est pas aussi anodin et anecdotique qu'il en a l'air. En effet, la carte SIM, fleuron incontesté de l'industrie de la carte à puce, représentera cette année sans doute plus de 65 % des livraisons de ce type de cartes dans le monde (2). Une rupture technologique dans ce domaine pourrait donc modifier profondément les modèles de commercialisation stratégiques actuels, avec l'arrivée de nouveaux entrants sur ce marché, comme les fabricants de cartes mémoires MMC ou SD, au détriment des fabricants historiques de cartes à puce. Ou bien encore obliger ces derniers à investir dans de nouveaux équipements de production afin de fournir aux opérateurs télécoms de nouvelles générations de cartes à puce. L'enjeu est donc de taille, mais son issue reste incertaine. Les MMC, conçues pour la DRM et la portabilité Ces « offres technologiques » visent à montrer la réversibilité des solutions combinant MMC/ SD et carte à puce. Elles se veulent « agnostiques » sur le facteur de forme qui serait le plus approprié. Les questions de la capacité mémoire et de la portabilité des différentes solutions montrent pourtant des différences, qui peuvent être importantes pour le choix de telle ou telle solution. On sait par exemple qu'une récente décision de l'Etsi, pour répondre à une demande émanant de fabricants de terminaux japonais, a défini un format de carte SIM (le 3FF) qui réduit la surface de cette dernière de moitié : de 25 x 15 mm actuellement à 14 x 12 mm pour la carte 3FF. Cette décision a été prise pour s'adapter à la réduction de taille de certains terminaux 3G dédiés notamment à la transmission de données. Un paradoxe au moment où l'on cherche tous les moyens pour accroître les capacités mémoires. Car les capacités en mémoires flash ne seront donc pas tout à fait identiques pour les SIM et pour les MMC ou SD, en dépit de ce que clament bon nombre de fournisseurs de microcircuits pour cartes à puce et de fabricants de mémoires flash. La portabilité est également un argument de poids. Celle des cartes MMC et/ou SD qu'il est facile d'opposer au caractère seulement amovible de la SIM pourra sans doute jouer en faveur des cartes flash pour les applications de DRM. La spécification « Secure MMC » a été développée en outre spécialement par un groupe de travail de la MMC Association pour servir de plate-forme à l'un des plus importants standards en matière de DRM : le OMA-DRM. Cette spécification, dont la version v2.0 a été publiée cette année par l'Open Mobile Alliance, fait appel à des technologies non propriétaires (PKI, Public key infrastructure, notamment) et est soutenue à la fois par la plupart des fabricants de mobiles, les opérateurs et les fabricants de cartes mémoires. Un atout « politique » important, mais qui n'est pas le seul. Techniquement, la Secure MMC, grâce à sa portabilité sur d'autres équipements que les mobiles (PC, TV, PDA, caméras DV, appareils photos), offre en effet un vecteur de poids aux services DRM et un confort certain aux utilisateurs. Elle autorise également des débits trois ou quatre fois supérieurs à ceux des cartes à puce (jusqu'à 52 MHz sur un bus de 8 bits) et une double tension d'alimentation, 1,8 V et 3 V. L'objectif est de s'adapter au plus grand parc de mobiles et d'équipements équipés de lecteurs capables d'embarquer des applications Java Card (applets), dont des services DRM définis par l'OMA, des applications de M-commerce (l'achat à travers son mobile, la compatibilité avec les spécifications Mc-EX étant assurée par l'implémentation de commandes spécifiques au niveau du contrôleur) ou toute application réclamant un haut niveau de sécurité. Renesas Technology propose d'ailleurs une API (Application programing interface) avec son kit de développement logiciel dédié à l'écriture ou la réécriture d'applications faisant appel à sa plate-forme Secure MMC/Mc-EX. Matsushita Electric (Panasonic), a également rendu compatible sa carte flash au format SD embarquant un circuit de cartes à puce (un circuit mémoire sans contact) avec des services de DRM. Cette carte est ainsi compatible avec des services de protection de contenus conformes au standard CPRM (Content protection for recordable media) développé par IBM, Intel, Mat-sushita et Hitachi. C'est l'équivalent des travaux de l'OMA dans le monde de la SD. Baptisé « Smart SD », cette carte mémoire sans contact annoncée en octobre dernier associe en fait deux circuits mémoire à un microcontrôleur générique : une mémoire flash dont une partie est sécurisée ; et une mémoire Fram associée au circuit sans contact, de façon à optimiser les transactions puisque les temps d'écriture en Fram sont quatre à cinq fois plus rapides que ceux d'une mémoire classique. On sait qu'en sans contact le temps est compté et que ce facteur peut jouer aussi un rôle important en matière de sécurité. Mais c'est aussi une caractéristique qui accroît la portabilité de la carte. Et qui pourrait permettre au mobile d'être utilisé pour faire du micropaiement sans contact répondant aux normes Iso 14443 ou au standard de facto de Sony en Asie, FeliCa. Avantages donc en matière de capacités mémoire, en portabilité et capacité à communiquer aux mémoires flash de type MMC ou SD sécurisées. Pourtant les choses ne sont pas aussi tranchées, et la SIM n'a pas dit son dernier mot. On sait que ce type de cartes fait en ce moment l'objet de travaux dans des instances chargées d'établir des spécifications, voire des standards comme c'est le cas de l'Iso, mais aussi de l'OMA, du SCP, du SCAG, du 3GPP, de la SIM Alliance (voir glossaire). « La façon dont la carte communique aujourd'hui via le bus série Iso avec le mobile est en passe d'être révisée : il s'agit d'une solution à court terme qui nous permettra de passer en mode synchrone pour atteindre des débits de l'ordre de 5 Mbits/s contre un maximum aujourd'hui de 600 kbits/s. Et ce, au prix de quelques modifications mineures dans les circuits (buffers plus rapides, drivers spécifiques), et d'une révision des protocoles », explique Nicolas Prawitz. Par la suite, l'industrie aura la charge de remplacer l'Iso 7816-3 (communication) par un protocole sans doute plus proche des standards déjà existants : on sait que l'USB, le bus SPI, déjà utilisé par les MMC et SD, et différentes options sans contact de type RFID sont candidats. Quoi qu'il en soit, les caractéristiques à venir de la SIM s'approcheront de celles de la Secure MMC ou Smart SD d'aujourd'hui. Pour entrer en concurrence ou au contraire libérer des synergies. Ce sont les applications qui joueront le rôle de catalyseur : la DRM sans doute, mais aussi le M-commerce. L'industrie de la carte peut proposer des solutions, mais elle sait qu'elle ne peut lier son sort à celui d'un facteur de forme particulier. Au contraire, elle a montré qu'elle avait su à ce jour s'adapter et diversifier les formats pour répondre aux besoins de telle ou telle application : du format bancaire carte de crédit, aux réseaux USB pour les applications liées aux technologies de l'information, en passant par les trois formats SIM et les différents micropackagings pour des circuits sans contact dédiés aux passeports ou aux étiquettes électroniques. (1) Les mémoires dites férroélectriques sont des mémoires de type Ram qui ont le même avantage que les mémoires flash, c'est-à-dire la capacité de stocker des informations sans alimentation, tout en étant dotées d'une vitesse de lecture/écriture de quatre à cinq fois plus élevée que celle d'une mémoire Eeprom classique. (2) L'institut d'études iSuppli estime à 556 millions de pièces et à 16 milliards de dollars en 2008 le marché des cartes mémoire flash. Ce marché sera dès 2006, constitué à plus de 60 % par des cartes MMC (33 %) et SD (28 %). Le marché en 2003 des MMC et SD est estimé à un peu plus de 60 millions de pièces. Le marché des cartes SIM devrait être quant à lui de 880 millions de pièces cette année, selon Eurosmart. Glossaire Et si (European telecommunications standards institute) : l'organisme européen en charge de bon nombre de travaux de standardisation dans le domaine des technologies de l'information et de la communication, des télécoms (GSM notamment), et du broadcasting. SCP (Smart card plaform) : anciennement SMG9 qui présida à la naissance puis aux destinées de la carte SIM. Comité de l'Etsi en charge du développement et de la maintenance d'une plate-forme « circuit intégré » commune (SIM, UICC-USIM) pour tous les systèmes embarqués de télécommunications, et de la définition de spécifications pour les applications embarquées correspondantes, en particulier celles qui réclament un haut niveau de sécurité, comme le Mobile commerce. SCAG (Smart card application group) : groupe de travail au sein de la GSMA (GSM Association) chargé de faire des propositions aux groupes de travail de l'Etsi sur les caractéristiques et les spécifications des cartes SIM (2G) et cartes UICC (Universal integrated circuit card), les « cartes USIM » de la 3G. 3GPP (3G partnership project) : groupe de travail de l'Etsi en charge de la spécification touchant les applications USIM (Universal subscriber identity module) des cartes de la 3G. SIM Alliance : association regroupant des industriels de la carte à puce dont les objectifs sont de faire la promotion des services liés à la SIM, et de proposer aux instances de standardisation des évolutions et des moyens d'améliorer l'interopérabilité de la carte et de ses applications. SPI (Serial peripheral interface) : un bus série qui est disponible sur certains circuits de cartes à puce (Atmel notamment) et sur les cartes MMC et SD. Mc-EX (Mobile commerce extension specification) : ensemble d'instructions définies par Hitachi, Ingenix, Matsushita, SanDisk, et Toshiba. Elles ont été spécialement conçues pour combiner la sécurité de la carte à puce et les manipulations de données en mémoire flash dans les applications de commerce avec son mobile (Mobile commerce ou M-commerce) ou de e-ticketing. Iso 14443 : ensemble de spécifications standard définissant la communication (protocole, modulation, codage, anticollision) sans contact entre une carte à puce et un lecteur.

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