Couverture ElectroniqueS n°127

Lieu de rencontre entre utilisateurs, industriels et chercheurs, la manifestation Same s'est interrogée cette année, à travers ses présentations inaugurales, sur l'avenir des technologies Cmos à l'horizon 2015-2030 et sur l'impact du développement durable et des économies d'énergie sur l'électronique. La manifestation Same a eu lieu pour la onzième année consécutive les 1er et 2 octobre derniers à Sophia Antipolis. Rendez-vous automnal traditionnel des concepteurs en électronique, en général, et de la communauté des développeurs implantée sur la Côte d'Azur, en particulier, ce salon, accompagné d'un cycle de conférences techniques, est organisé par l'association Same avec le soutien de la Chambre de commerce et d'industrie de la région Alpes-Côte d'Azur.Cette année, la manifestation accueillait en ouverture Dennis Buss, chief scientist chez Texas Instruments, qui donnait sa vision prospective sur les technologies des semiconducteurs. Cinquante ans après la mise au point du premier circuit intégré par Jack Kilby chez TI, Dennis Buss rappelait d'abord que depuis le début des années soixante-dix, date de l'arrivée des premiers microprocesseurs, « la fréquence de fonctionnement des circuits s'est accrue en moyenne d'un facteur 10 000, leur consommation d'un facteur 1 000 pendant que leur taille était réduite d'un facteur 45 ». Dans le même temps, « le coût de fabrication des composants actuels est 100 fois plus élevé qu'il y a trente ans et le marché des circuits intégrés est passé de 700 $ à environ 270 milliards de dollars, une croissance d'un facteur 25 ». Cependant, selon Dennis Buss, l'industrie des semiconducteurs va devoir faire face à des changements très importants. Pour trois raisons principales : « D'abord l'épaisseur des grilles d'isolation dans les transistors est de l'ordre de la couche atomique, et il est physiquement impossible d'aller plus loin. Ensuite, en dessous de 32 nm, il existe trop de différences de comportement entre transistors au sein d'un circuit fabriqué dans ces technologies (c'est le problème de la variabilité). Enfin, le coût de design d'un produit devient trop élevé, ce qui va limiter l'utilisation de ces technologies aux seuls composants à très forts volumes. » En conclusion, « entre 2015 et 2020, il faudra donc inventer une nouvelle électronique ». Car la technologie Cmos actuelle poussée à ses limites ne sera plus un avantage compétitif pour celui qui la maîtrisera. Dans les prochaines années, « je vois plutôt une mise en commun des efforts de recherche pour arriver à une sorte de « c&oelig;ur Cmos » identique chez tous les fondeurs, et un développement de facteurs différenciateurs au niveau des technologies en analogique, en radiofréquence et en circuits Mems », poursuit Dennis Buss. Dans le même temps en poussant le Cmos à ses limites, « on sera capable dans les quinze ans qui viennent de réaliser des circuits à 100 milliards de transistors pour 1 $ », prédit l'Américain. En fait, durant les deux prochaines décades, « la loi de Moore va peut à peu s'avérer inopérante, pendant qu'en parallèle l'intégration au sein de circuits Cmos de mémoires embarquées accompagnées de micro ou nano systèmes va croître ». Et pendant ce laps de temps « il faudra que les laboratoires de recherche dans le monde entier travaillent à la découverte du successeur à la technologie Cmos qui, jusqu'à aujourd'hui, n'a toujours pas été inventé ».La montée en puissance des contraintes en termes d'environnement et de développement durable est aussi un sujet d'actualité fort pour la filière électronique. Certes, l'électronique n'est pas forcément moteur dans cette affaire, mais elle doit s'adapter aux industries qu'elle sert : l'automobile, avec des circuits d'aide à la maîtrise des rejets de CO2, la télévision avec l'avènement de Del « capables de faire chuter de moitié la consommation d'un écran de 40 pouces » selon Jacques Le Berre de NXP, ou encore la téléphonie portable, pour laquelle les recherches portent par exemple sur la gestion de coupures d'alimentation sélective sur des fonctions non utilisées, afin de diminuer la consommation en mode veille.Mais il est un domaine où l'électronique elle-même peut avoir un impact majeur sur l'environnement, c'est la consommation intrinsèque des circuits. A ce sujet, Ted Vucurevitch, le CTO de Cadence, lors de sa présentation, a estimé « qu'au-delà des progrès accomplis en termes de technologie dans les circuits, comme le « Frequency Scaling » par exemple, plusieurs autres approches seront nécessaires à l'avenir pour maîtriser la consommation des circuits ». La première porte « sur une meilleure et plus juste prise en compte de la consommation au niveau des spécifications », explique Ted Vucurevitch. La seconde a trait « au développement de modèles de consommation global d'un système incluant les interactions entre le circuit et son environnement. A terme, on pourrait imaginer un contrôle en temps réel des technologies de limitation de la consommation d'un circuit, via des couches de logiciels embarqués, selon les évolutions de la consommation du système dans lequel il est incorporé ».Une vitrine pour les start-up européennesDepuis quelques années, un des attraits de Same est aussi de découvrir de jeunes sociétés du domaine de la CAO ou des IP. Pour la seconde année, les organisateurs de Same ont décidé de remettre un prix spécial à la start-up jugée la plus innovante et la plus prometteuse en termes de développement (*). Pour l'édition 2008, c'est la société espagnole Elastix qui remporte le trophée, succédant ainsi à la société suédoise AnSyn, l'heureuse élue de 2007. Rappelons que la technologie d'Elastix vise à faciliter l'implantation de logiques asynchrones au sein d'un circuit synchrone classique, afin de répondre de manière automatique aux problèmes de variabilité rencontrés dans les fabrications en 45 nm et en deçà. L'idée est de concevoir des signaux d'horloges « élastiques » qui s'adaptent aux caractéristiques intrinsèques des circuits, donc de tirer parti de la variabilité et non de la subir ou de la contourner. Cette approche vise dans le même temps à optimiser la consommation d'une puce, en autorisant plusieurs blocs d'un circuit à fonctionner sous des tensions différentes de manière moins rigide qu'avec la technique des îlots de tension dans une logique purement synchrone.Parmi les autres jeunes pousses qui montraient leur projet, signalons la société française Asygn, issue d'un essaimage du Leti, qui développe un outil et une méthodologie de simulation au niveau système de blocs analogiques intégrés dans des circuits mixtes. De son côté, Invia propose des blocs IP pour des applications sécurisées, avec un savoir-faire spécifique pour l'implantation de ponts USB dans les circuits (liés à la maîtrise de la spécification IC_USB).A terme, Invia souhaite aussi développer et commercialiser des plates-formes sécurisées complètes, incluant leurs c&oelig;urs IP. La société fait en outre partie des PME innovantes qui participent aux programmes de recherche du pôle de compétitivité SCS (Solutions communicantes sécurisées).(*) La start-up est choisie par un jury constitué de membres de sociétés du semiconducteur, d'éditeurs de logiciels ainsi que de représentants de la presse spécialisée.

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