Couverture ElectroniqueS n°127

Marché le plus conséquent d'Europe pour l'électronique, l'Allemagne est dotée d'un tissu industriel fort d'ETI et de PME ambitieuses de plus en plus demandeuses d'aide au design et de sous-traitance de fabrication. Dans ce pays, la filière de l'électronique apparaît déjà comme une réalité placée sous la houlette de l'association ZVEI. L e monde de l'électronique vit une mutation majeure qui affecte chacune des compo-santes de la filière (bureaux d'études, fournisseurs de composants et de services, et fabricants de matériels). Cette mutation s'opère sous la pression de la révolution médiatique et de la mondialisation – ces deux événements étant intrinsèquement liés. Soumis à une accélération des phénomènes, à un empressement généralisé et à une demande croissante de transpa-rence, les divers maillons de la sup-ply chain de l'électronique n'ont le plus souvent comme solution que de tisser des partenariats serrés et de long terme avec l'amont et avec l'aval, ce qui revient à substituer à une culture basée sur la défiance et l'opportunisme, une culture reposant sur la confiance. Ce faisant, ces structures créent la stabilité et la sérénité nécessaires à l'expression de la créativité et à l'amélioration constante de la qualité – concept qui est amené à lutter contre la recherche effrénée d'amélioration de la rentabilité. Au plan de la production, l'évolution générale a pour objectif la mise en place de l'usine du futur encore dite industrie 4.0. « Notre site allemand s'inscrit parfaitement dans notre programme de transformation menant à l'industrie du futur, une industrie plus digitale, plus connectée, plus collaborative et, au final, plus efficace et plus compétitive », remarque Stéphane Gendrot, vice-président Business Development chez Lacroix Electronics. Au plan des entreprises, l'évolution passe par la communication, tant interne qu'externe, avec pour objectif toujours plus de transparence. Pour l'ensemble des constituants de la filière, il s'agit de mieux communiquer, de mieux se comprendre et, in fine, de s'harmoniser. Cette tendance est à la base de la création des comités stratégiques de filières dont celui de la filière des industries électroniques (qui a vu le jour le 15 mars 2019). Or, en ce qui concerne l'encadrement des différents acteurs de la filière électronique et le rapprochement de ces derniers, il se pourrait que l'Allemagne soit en avance sur la France : en effet, un organisme, le ZVEI y coordonne déjà depuis longtemps les différentes activités des divers domaines de la filière allemande de l'électronique. « C'est un syndicat très actif et très bien organisé qui fédère la profession au sens large. C'est un point central efficace, organisateur d'événements et de formations de valeur, qui apporte des solutions à la filière électronique », estime Stéphane Gendrot. D'une manière générale, « en Allemagne, la culture du partenariat est eaucoup plus développée qu'en rance » constate, quant à lui, Gilles enhamou, le p-dg d'AsteelFlash. ette particularité serait liée à l'im-ortance prise par les ETI (entre-rises de taille intermédiaire) dans e tissu industriel allemand à la dif-érence de la France où existent principalement des grands groupes – qui sont des donneurs d'ordres ayant davantage, du fait de leur importance, le travers d'imposer leurs contraintes aux sous-traitants avec lesquels ils sont en relation – et des petites entreprises. « Le travail est plus aisé entre ETI et sous-traitant », résume M. Benhamou. L'importance des ETI outre-Rhin En Allemagne, la proportion d'ETI au sein de l'ensemble des entreprises industrielles est beaucoup plus élevée qu'en France. Or, « les relations des Contract Manufacturers avec les ETI sont beaucoup plus fructueuses qu'avec les grands groupes », insiste M. Benhamou. Car ces ETI allemandes comme certaines PME de ce pays ont une volonté affichée de grandir au plan mondial. « Les entreprises de taille intermédiaires sont particulièrement intéressées par l'offre de services au plan mondial – notamment le sourcing et la fabrication – qu'un groupe comme AsteelFlash peut leur offrir », remarque Gilles Benhamou. STÉPHANE GENDROT, vice-président Business Development chez Lacroix Electronics “ En Allemagne, beaucoup d'entreprises fabriquent en interne et sous-traitent seulement une partie de leur production. ” Et nombre de PME et d'ETI de l'électronique ont conservé une forte culture technique, une culture qui fait de plus en plus défaut à la France : « beaucoup d'entreprises allemandes fabriquent en interne et sous-traitent seulement une partie de leur production », remarque ainsi Stéphane Gendrot. « Nombre de fabricants allemands de matériels électroniques ont conservé une part non négligeable de leur production en interne », renchérit M. Benhamou. Qui ajoute aussitôt : « même si cela change progressivement et que ces entreprises ont tendance à s'aligner sur ce qui se passe ailleurs dans le monde ». Une bonne nouvelle pour la sous-traitance en électronique car il y a donc en Allemagne un marché potentiel important. Cette conservation d'un savoir technique se traduit au quotidien par le fait que les donneurs d'ordres d'outre-Rhin savent parfaitement définir leurs besoins auprès des sociétés de services auxquelles ils s'adressent. Et ces donneurs d'ordres, à profil d'entreprises de taille moyenne souvent familiales, plébiscitent le fait que le sous-traitant soit géographiquement proche. En outre, en Allemagne, les petits industriels sont encore plus demandeurs d'études (design…) qu'en France, selon M. Gendrot. « Les industriels qui n'ont pas ou n'ont que peu de ressources en R&D apprécient grandement notre offre complète de services – qui va du design à la production… En industriel et en Building Automation, nous sommes souvent impliqués dès la phase de conception », constate-t-il. Autre point à souligner : « S'il n'y a pas de professionnalisme plus mar-qué d'un côté ou de l'autre du Rhin, il est certain que les Allemands privilégient le critère qualité », selon M. Gendrot. Le Made in Germany a une réputation à défendre « même si le Made in France est en train de bâtir sa renommée », ajoute-t-il. Un marché industriel conséquent GILLES BENHAMOU, p-dg d'AsteelFlash “ La culture du partenariat est beaucoup plus développée en Allemagne qu'en France. Le site de Willich de Lacroix Electronics couvre notamment les secteurs de l'industriel et du Building Automation. Il propose une palette complète de services allant du design de produits à la production et au-delà (logistique, SAV…). Malgré une concurrence importante – l'Allemagne compte plus de 500 sous-traitants en électronique –, Lacroix Electronics a su s'imposer comme un acteur influent outre-Rhin. Ceci grâce à l'acquisition de l'usine Prehtronics de Willich (près de Düsseldorf) en 2008. Spécialisé, lors de ce rachat, en électronique automobile et en médical, ce site a été « reformaté » par Lacroix Electronics pour l'industriel et le Building Automation (systèmes de régulation des bâtiments), « Lacroix disposant déjà de deux centres d'excellence pour l'automobile (en Pologne et en Tunisie) », explique M. Gendrot. Ce site continue aussi à avoir une activité en électronique de défense qui pourrait être étendue par la suite à l'aéronautique, selon le vice-président. Ce repositionnement de Willich est loin d'être anodin puisque l'Allemagne est, par excellence, la terre de l'industriel et de l'automation. « Pour Lacroix Electronics, l'Alle-magne est stratégique pour trois raisons : l'importance de son marché en électronique – qui est le premier d'Europe –, la présence dans ce pays de clients de longue date doublée de la venue de nouvelles opportunités liées à notre renommée, et l'appartenance à un groupe (Lacroix) qui considère lui-aussi ce pays comme stratégique », conclut le VP Business Development de Lacroix Electronics. Concernant ce dernier point, rappelons qu'en janvier 2019, Lacroix Group a acquis l'allemand SAE IT-Systems (75 personnes, 15 millions d'euros de chiffre d'affaires annuel) spécialisé dans la conception et la fabrication de systèmes de surveillance et de télégestion des réseaux électriques (Smartgrid). Cette opération a permis à Lacroix de renforcer son offre à destination du Smart Environment (filiale Lacroix Environnement, orientée télégestion et télé-contrôle des réseaux, notamment d'eau). Peu de particularités nationales en B to B En Allemagne comme en France, les donneurs d'ordres des sous-traitants de l'électronique appartiennent à la sphère du professionnel, du B to B pour reprendre une expression à la mode. Ce qui signifie qu'il y a quand même peu de différences entre leurs comportements, tous ayant tendance à privilégier les relations à long terme avec les sous-traitants. « En France comme en Allemagne, nous nous adressons à des industriels leaders sur leurs marchés, avec lesquels nous entretenons des relations sur le long terme », confirme M. Gen-drot. Donc peu de différences dans les manières de travailler, même au niveau de la fourniture de prévisions au sous-traitant : « tous essaient de nous fournir les prévisions les plus précises possibles, car ils sont conscients des enjeux », souligne le VP Business Development. Toutefois, comme les prévisions les meilleures n'empêchent pas les incidents, ces donneurs d'ordres sont à la recherche de « sous-traitants offrant agilité, flexibilité et capacité à innover au plan de la supply chain (personnalisation en fin de chaîne…) », selon M. Gendrot.

Sous-traitance en électronique : l’Allemagne, terre des ETI

Couverture ElectroniqueS n°127

IBM grave les premières puces en 2 nm en abandonnant les FinFET

Zeta, le protocole LPWAN made in China, arrive en Europe

Harting invente le connecteur électronique sur mesure

Sous-traitance en électronique : l’Allemagne, terre des ETI

Dans la même rubrique

Couverture ElectroniqueS n°127

IBM grave les premières puces en 2 nm en abandonnant les FinFET

Zeta, le protocole LPWAN made in China, arrive en Europe

Harting invente le connecteur électronique sur mesure