Couverture ElectroniqueS n°127

Qui va gagner la bataille des écrans plats grands formats sur le marché juteux de la TV ? Telle était la question au centre des débats d'une table ronde qui a eu lieu lors de la dernière manifestation SID où six experts des LCD, des plasmas et de la rétroprojection ont confronté leurs opinions. Morceaux choisis. La réelle démocratisation des technologies d'écrans plats sur le marché de la télévision nécessite une baisse importante des prix. A quoi peut-on s'attendre sur ce point dans les années à venir ?Harm Tolner (pionnier des écrans plasma, anciennement chez Philips, aujourd'hui consultant) : « Pour que les technologies d'écrans plats se démocratisent réellement, il faut absolument que leurs courbes de prix (en fonction de la diagonale d'écran) rejoignent celle des tubes cathodiques. Cela implique des téléviseurs plats de 42 pouces de moins de 3000 dollars (en extrapolant) et un prix moyen inférieur à 2000 dollars pour des tailles équivalentes à celles des CRT grands formats (26 à 36 pouces). Les écrans plasma sont plus aptes que les LCD à atteindre ces objectifs, d'autant qu'ils disposent aujourd'hui d'un avantage important : ils sont de 20 % à 30 % moins chers que les LCD grands formats. Cet avantage devrait perdurer encore très longtemps compte tenu des investissements engagés et des capacités de production qui augmentent à la vitesse grand V, tout comme pour les LCD. »Sang Soo Kim (vice-président de la division LCD-TFT de Samsung) : « Les LCD pourront atteindre de tels objectifs vers 2005 lors du déploiement des usines de LCD-TFT de génération 7 qui travailleront à partir de dalles de près de 4 mètres carrés et qui fabriqueront en grand volume des écrans entre 30 et 40 pouces. Avec de telles usines, il sera possible de fournir des panneaux LCD-TFT de 32 pouces pour la TV à 700 dollars, ouvrant ainsi la voie à des téléviseurs LCD de 32 pouces vendus moins de 2000 dollars. »Gary Feather (directeur de la division développement de marchés chez Sharp Labs of America) : « Globalement, les LCD seront bientôt très compétitifs face aux écrans plasma dans la plage de diagonales 30 à 45 pouces. »Peter Van Kessel (responsable technique Texas Instruments en charge des systèmes DLP) : « Aujourd'hui, les systèmes à rétroprojection proposent le meilleur rapport diagonale sur prix d'achat. Un téléviseur de type rétroprojecteur à DLP de 43 pouces se vend moins de 3 500 dollars. Cette technologie gardera toujours une longueur d'avance sur ce point par rapport aux LCD et aux plasmas, notamment grâce aux DLP. En 2005, le prix de l'ensemble des constituants d'un téléviseur à rétroprojection DLP ne dépassera pas 750 dollars pour une version de 43 pouces. Il sera alors possible d'acheter un téléviseur DLP de cette taille pour moins de 2000 dollars, alors que, pour le même prix, vous ne disposerez que d'un téléviseur LCD ou plasma de 30 pouces. De même, il sera possible d'acheter un rétroprojecteur DLP de 60 pouces pour le prix d'un LCD ou d'un plasma de 42 pouces. Globalement, au-delà de 40 pouces de diagonale, la rétro-projection dominera le marché car la courbe des prix devient exponentielle au-dessus de cette frontière dans le cas des technologies LCD-TFT et plasma. »La rétroprojection s'affiche clairement comme la solution la moins onéreuse. Quel est son plus gros défaut ?Larry Weber (p-dg de Plasmaco, filiale américaine de Matsushita pour les écrans plasma) : « Soyons francs : durant les deux dernières années, il est clair que la technologie DLP a grandement contribué à augmenter les performances des systèmes de rétroprojection, qui disposent aujourd'hui d'images bien contrastées et dotées d'un panel de couleurs étendu. Mais la rétroprojection a un gros inconvénient : le grand pouvoir de décision des femmes dans le choix d'un téléviseur. C'est un objet qui occupe en effet une place importante dans la pièce à vivre de la maison, surtout lorsqu'il s'agit d'écrans de grande taille. De ce point de vue, les systèmes à rétroprojection sont clairement désavantagés de par leur volume imposant, d'autant qu'ils ne permettent pas d'accrocher le téléviseur au mur, comme un tableau de maître. »David Slobodin (directeur technique d'InFocus, fabricant de projecteurs) : « La réduction de la profondeur est l'un des points sur lesquels les fabricants de téléviseurs à rétroprojection se focalisent. Des progrès importants ont été réalisés à ce sujet et cela va continuer dans les années à venir. Et pour répondre à M. Weber, je dirai que la diffusion d'évènements sportifs est la principale raison qui pousse les hommes à acheter un équipement “ Home Cinema ”. Et là, je ne vois rien de mieux qu'un téléviseur à rétroprojection de 60 ou 70 pouces pour visionner un bon match de football, ce que ne saurait faire un écran plasma ou LCD à un prix raisonnable. »Il y a trois ans, personne n'aurait songé à inviter des acteurs des LCD-TFT à cette table ronde. Aujourd'hui, on voit des écrans de 30 à 54 pouces de diagonale avec des performances impressionnantes. Qu'est-ce qui peut freiner leur progression ?H. Tolner : « Les fabricants de LCD-TFT ont un gros problème : le coût de leurs usines. Il faut investir 1,2 milliard de dollars pour une usine de génération 6 et 2,5 milliards dans le cas d'une usine de génération 7. Une usine d'écrans plasma nécessite, quant à elle, un investissement de “ seulement ” quelques centaines de millions de dollars. De plus, le coût des éléments constituant un écran de 42 pouces est deux fois moins élevé dans le cas d'un plasma que dans celui d'un LCD-TFT fabriqué à partir d'une usine de génération 5 ou 6. Ce facteur atteint 3 pour des écrans de 50 pouces. Autre gros problème pour les LCD : les applications “ Home Cinema ” nécessitent l'obtention d'un noir parfait, ce qui n'est pas possible avec les LCD puisque l'extinction est obtenue par polariseurs croisés, dont on sait qu'ils ne peuvent totalement stopper la lumière. Les LCD souffrent également encore de problèmes d'artéfacts en ce qui concerne la vidéo, y compris dans le cas des derniers prototypes grands formats présentés. »G. Feather : « Le contraste est l'un des éléments clés dans le choix d'un téléviseur pour le “ Home Cinema ”. Sur ce point, les LCD sont clairement avantagés par rapport aux plasmas car leur contraste est supérieur quel que soit l'environnement lumineux dans lequel ils sont utilisés, excepté dans le noir. »L. Weber : « C'est justement la raison pour laquelle les plasmas représentent un meilleur choix pour le “ Home Cinema ” car les émissions ou les films en prime time se regardent la plupart du temps dans une pièce sombre. »En quelques mots, votre conclusion des débats ?G. Feather : « Il n'y aura ni perdant, ni vainqueur. Chaque technologie trouvera sa place car le marché est énorme. »D. Slobodin : « Je pense effectivement qu'il n'y aura pas une technologie gagnante. Le véritable gagnant sera le client, qui disposera bientôt, et pour la première fois, d'un choix de technologies d'écrans plats dont les prix vont fortement baisser dans les années à venir. »L. Weber : « Notre but à tous n'est pas de disposer d'une part de marché supérieure à celles des technologies concurrentes mais bien d'arracher le marché des téléviseurs aux tubes cathodiques. »

« Toutes les technologies d’écrans plats pour la TV ont une place à prendre »

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